Il y a cinq ans, Jeanne s’installait dans la petite municipalité de Saint-Casimir, située dans la MRC de Portneuf. Originaire de Lévis, la travailleuse autonome obtenait de plus en plus de contrats pour la production d’événements culturels. En 2018, pour répondre à la demande, elle fondait Artefact Urbain dans son village d’adoption.
L’entreprise réalise des projets culturels de toutes sortes avec comme clients des villes, des MRC et des organismes.
Le 13 mars, tous ses contrats ont été annulés. «Le milieu culturel était paralysé», se souvient la directrice générale. Elle a dû mettre à la porte la totalité de ses employés. «Ça a été le moment le plus difficile en tant qu’entrepreneure.»
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Immédiatement, son conjoint Aaron Bass, directeur technique dans l’entreprise, a eu l’idée de produire des visières de protection à l’aide d’imprimantes 3D. Elles sont fabriquées à partir d’un modèle offert en ligne qu’ils ont modifié pour respecter les standards de Santé Canada.
Depuis, plus de 6000 visières ont été produites par l’entreprise et distribuées dans les CHSLD, chez les optométristes et aux restaurateurs.
De mars à juin, cette initiative a été leur unique source de revenus. Cela leur a aussi permis de réembaucher la moitié de leurs employés et de maintenir leur chiffre d’affaires annuel de 750 000 $.
Entre-temps, tout un remue-méninges s’est mis en place pour trouver des solutions, le milieu culturel étant durement touché.
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Vers des solutions
Depuis juin, les choses vont bon train chez Artefact Urbain. Jeanne a pu récupérer le trois quarts des projets prévus. Mais pandémie oblige, des modifications s’imposaient. «Les projets ont changé de A à Z.»
La production de vidéos, de balados, ainsi que la webdiffusion de spectacles sont désormais au centre de leur processus créatif. «On n’avait pas le choix. Ce sont les seuls moyens de diffusion en temps de pandémie.»
Par exemple, le gala des Prix d’excellence des arts et de la culture qui devait se tenir en présentiel se fera sous la forme d’un film réalisé par Artefact Urbain. L’entreprise assurera aussi la webdiffusion du spectacle du groupe musical Les Louanges, en plus de tourner quelques clips vidéo behind the scene pour bonifier la formule.
L’équipe s’est aussi agrandie. Jeanne a embauché trois nouvelles personnes chargées des vidéos et du numérique. Ils sont désormais 11 employés dans la compagnie. «Malgré la pandémie, on est en croissance», lance la femme de 32 ans.
«On a développé une nouvelle expertise au sein de l’entreprise qu’on va conserver même lorsque la pandémie sera terminée», soutient-elle.
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Il y a aussi ces contrats qui n’ont pas changé malgré la crise, voire, se sont accélérés. C’est le cas du projet Portneuf Virtuel qui documente les décors intérieurs des 21 églises de Portneuf : visites virtuelles, scan 3D et photogrammétrie. Toutes des technologies utilisées pour réaliser ce contrat octroyé par la MRC de Portneuf.
Éliane Trottier, agente de développement culturel pour la MRC, affirme que ce projet a pu se poursuivre sans égards aux mesures sanitaires. «La COVID-19 a fait en sorte que certains projets ont été priorisés pour pouvoir avancer le plus possible.»
Malgré la panoplie d’événements culturels qui ont été annulés ou reportés, cette dernière assure que le budget de la MRC pour le milieu culturel ne s’est pas rétréci. Le montant des subventions réservé et alloué à la culture demeure le même.
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Reste à voir les projets qui seront proposés, précise Mme Trottier. L’innovation sera un critère particulièrement important dans le processus de sélection. Ce sera aux entrepreneurs de se montrer créatifs. «On veut que les gens réfléchissent à des propositions innovantes au cas où des modifications dans les mesures sanitaires survenaient. Ils devront se réinventer, ils n’ont pas le choix.»
La recette n’existe pas
Jeanne l’admet, ils ne croulent pas sous la demande des contrats. Certains sont mis sur la glace tandis que d’autres arrivent au compte-gouttes, voire, à la dernière minute. «Normalement, on a des événements annuels, récurrents. Je sais exactement à quoi ressemblera mon calendrier pour l’année, souvent un ou deux ans à l’avance. Là, je n’ai aucune idée», angoisse-t-elle.
«Les clients sont plus frileux à accorder des contrats, constate-t-elle. Car personne ne sait ce que seront les nouvelles mesures dans les prochains mois.»
Malgré cette incertitude, Jeanne pense déjà à l’été prochain et aux futurs contrats qu’ils dénicheront. Toutefois, avec prudence. «Je n’accepterai pas de projets qui n’ont pas de plan COVID. Parce que la dernière chose que je veux faire, en tant qu’entrepreneure, c’est de devoir mettre à pied mes employés une deuxième fois.»
La directrice générale est pourtant très optimiste pour l’avenir. Elle-même adepte de spectacles de musique et de festivals, elle est convaincue que le public sera au rendez-vous une fois la pandémie passée. «C’est un flou, une période difficile à traverser, mais il y aura une relance astronomique. Les festivals seront achalandés comme jamais vu. Je sens qu’on va avoir de la job!»
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C’est plutôt du côté des clients que ses craintes demeurent. «Est-ce que nos clients voudront encore dépenser de l’argent pour des projets culturels dans le contexte actuel?» s’inquiète Jeanne.
Pour l’instant, la directrice générale leur propose des projets culturels extérieurs dans des lieux inusités, produits dans un format multidisplinaire. Question de se démarquer. «Normalement, un festival, c’est toujours la même recette. Mais là, la recette n’existe pas.»
Néanmoins, neuf mois après le début de la crise, Jeanne est plus que satisfaite des changements apportés à son modus operandi. «On est maintenant une équipe plus solide qu’avant la pandémie.»
Car créer des contenus culturels avec les contraintes de la pandémie représente tout un défi pour Artefact Urbain. Un défi «stimulant», précise Jeanne. Et tout indique qu’elle n’est pas à la veille de baisser les bras. «Même avec la crise, mon travail est extrêmement créatif et aussi l’fun qu’avant. Il faut juste penser en dehors de la boîte dans la manière d’approcher les projets», avance-t-elle.