[GÉRER LA CRISE] Madame Labriski: prendre du recul pour mieux rebondir

Mériane Labrie

La pandémie de coronavirus a tout changé pour les entrepreneurs d’ici qui en ont souffert, mais qui ont aussi rebondi dans la tempête, faisant parfois jaillir de nouvelles façons de faire. À l’heure de la seconde vague, nous poursuivons les rencontres de cette série «Gérer la crise».


  • Entreprise : Madame Labriski
  • Type d’entreprise : blogues, livres de recettes et développement et vente de produits alimentaires
  • Contact : Mériane Labrie

Q Votre situation avant la crise?

R Madame Labriski a commencé par un blogue en 2012 qui s’appelait «Ces galettes dont tout le monde parle». J’avais la vision que je pouvais faire une différence dans l’alimentation. Parallèlement, j’avais une fascination pour les entrepreneurs qui sont partis de rien et qui ont créé des empires. Mon souhait à l’époque était de signer un livre de recettes à la purée de dattes. Ces galettes dont tout le monde parle a finalement été publié (135 000 copies vendues à ce jour) et j’ai commencé à donner des conférences et des ateliers culinaires dans les écoles. Quelques mois plus tard, je me suis associée et j’ai créé Madame Labriski inc. J’avais alors le projet de créer de la purée de dattes et j’ai eu la chance de rencontrer la bonne personne au bon moment. Ma gamme de purées (caramel, vanille, chocolat) est sortie au printemps 2018 chez Rachelle-Béry puis chez IGA. Par la suite, il y a eu la publication de mon second livre Bye Bye sucre raffiné, bonjour purée de dattes, la première vague de produits de pâtisserie Madame Labriski (galettes), puis les muffins (2019). J’ai aussi publié deux romans jeunesse de mon héroïne Mini Labriski qui a la même mission que Madame Labriski, soit de freiner la surconsommation de sucre raffiné.

Q Comment avez-vous réagi lorsque la crise est arrivée?

R J’avais fait ma mission commerciale en France en janvier. Et volontairement en février, je n’avais pas accepté de conférences, car je devais me concentrer sur la rédaction de mon troisième livre de cuisine, Ces muffins dont tout le monde parle, sorti cet été. En mars, je tombais en haute saison de conférences. Je devais en donner une à deux par semaine. Tout ça a arrêté d’un coup. Ç’a été un choc. J’ai été comme dans un univers parallèle. Mais en même temps, j’avais besoin d’un break et d’un peu de recul. J’ai beau être en forme, un moment donné, il y a une limite.

Par la suite, j’ai décidé de tout revoir ma gamme de produits offerts à l’épicerie. Les muffins cuits sur place en épicerie, ça ne marchait pas. Il y a trop de manipulations en cette période de COVID. Et en plus, ils étaient massacrés parce que les gens n’utilisaient pas les cassettes nécessaires pour la cuisson. Comme ma pâte ne contenait ni sucre ni gras, les muffins collaient dans les moules. J’étais fière de mes produits et pour m’assurer qu’ils soient impeccables, j’ai donc mis le pied sur l’accélérateur et j’ai travaillé sur une nouvelle gamme de muffins qui serait produite dans une de mes usines. J’ai aussi développé une nouvelle gamme de galettes qui, comme les muffins, sont sorties en épicerie en septembre. J’ai aussi revu mon site Web qui est maintenant une vitrine bilingue avec une portion numérique.

Q Quels ont été les impacts de la crise sur vos affaires?

R Les commandes ont vraiment diminué. Et je me suis demandé pourquoi. Dans les épiceries, c’était l’enfer. Mes produits étaient cuits sur place et les employés des épiceries n’avaient pas le temps de s’occuper de leur cuisson. En même temps, j’ai aussi compris que les consommateurs avaient changé leurs habitudes. Et ça, c’était étourdissant, ça faisait peur. Ainsi, plusieurs personnes avaient commencé à faire elles-mêmes leur purée de dattes. Plusieurs me demandaient d’ailleurs quelle sorte de dattes je prenais pour faire ma purée. Et c’est de là qu’est née l’idée d’offrir des dattes Madame Labriski.

«Je dis toujours avec humour que je construis l’empire Madame Labriski»

Q Comment voyez-vous le retour à la normale?

R J’ai hâte. Et pas juste parce que l’on va recommencer à vivre normalement. Je me dis que je vais être vraiment plus solide que je l’étais. Pour moi, 2020 aura été une année de ménage global. Il y avait des zones sombres dans mon entreprise et je les ai nettoyées. Je me suis dit qu’il fallait que j’écoute la vie et que mes affaires soient bien placées, alignées et solides sinon tout pourrait déraper.

Q Quels sont vos prochains projets?

R J’ai trois usines où je développe mes différents produits. Après l’arrivée de trois sortes de muffins et de deux sortes de galettes véganes dans tous les IGA, Rachelle-Béry, Marché Tradition et Bonichoix du Québec, trois nouveautés seront lancées sur la marché, soit des dattes dénoyautées au goût de caramel pour la collation et des demi-dattes dénoyautées idéales pour cuisiner, toutes deux sans sucre ajouté, et une bûche de Noël. La Bomba Rosa est un gâteau roulé vanillé agrémenté d’un coulis à la framboise, d’une ganache au chocolat et d’un croustillant à la noix de coco grillée. Elle est certifiée sans gluten, sucrée à la purée de dattes, sans sucre raffiné ni matières grasses ajoutés, sans produits laitiers ni agents de conservation, arômes ou colorants alimentaires.

Si le contexte le permet, je me rendrai aussi à Paris en janvier. Mon deuxième livre, Bye Bye sucre raffiné, bonjour purée de dattes, sera lancé en France, en Belgique, en Suisse et au Luxembourg. Je veux continuer à développer de nouveaux produits, faire des conférences et des ateliers culinaires dans les écoles, publier des romans jeunesse de Mini Labriski qui a un potentiel incroyable pour entrer dans les écoles et continuer à organiser le MégaRelais Madame Labriski.

Je dis toujours avec humour que je construis l’empire Madame Labriski. Et j’ai vraiment fait le choix d’ouvrir la valve des possibilités. Je souhaite créer une entreprise où les gens sont super heureux. Je sens que j’ai une mission de vie : celle de faire évoluer le domaine de l’alimentation. Œuvrer dans autant de sphères en même temps, c’est beaucoup pour une mini équipe. C’est une vie en parallèle qui demande beaucoup de travail et d’amour. Mais pour moi, il n’y a aucune limite où la marque Madame Labriski peut aller. Et j’ai quand même un certain succès. Je fais de belles ventes et je gagne des prix (Fidéides 2020 et 2018, entrepreneure de l’année à Femmes d’affaires du Québec et entrepreneure visionnaire de l’année de la Chambre de commerce et d’industrie de Québec en 2019).

Mériane Labrie