Mort de Jacques Godin, monument québécois du théâtre et de la télé [PHOTOS ET VIDÉOS]

Jacques Godin, en 2010. L’illustre acteur québécois a succombé à une défaillance cardiaque à l'âge de 90 ans, lundi.

MONTRÉAL — L’illustre acteur québécois Jacques Godin n’est plus.


L’Agence Goodwin, qui le représente, a précisé par communiqué qu’il a succombé à une défaillance cardiaque à l'âge de 90 ans, lundi, à l’Hôpital de Verdun.

La date des funérailles sera annoncée ultérieurement.

La comédienne et metteuse en scène Denise Filiatrault a raconté à La Presse Canadienne qu’elle avait l’intention de retourner sur les planches prochainement avec Jacques Godin.

«Michel Tremblay nous avait écrit une pièce à deux personnages sur la COVID-19, pour jouer au Théâtre du Rideau Vert, mais je n’avais pas eu le temps d’y en parler... J’aurais aimé ça revenir au théâtre avec lui», a raconté Denise Filiatrault.

La directrice de théâtre se souvient de Jacques Godin comme d’un «très grand acteur, un homme solitaire, gentil, respecté de tous, et qui avait beaucoup d’humilité, ce qui est très rare chez les acteurs. J’ai eu la chance de travailler avec lui, c’était un homme exceptionnel.»

Le Montréalais d’origine a marqué le paysage culturel de la province pendant de nombreuses décennies, ayant joué dans plus de 230 productions, tant à la radio qu’au théâtre, à la télévision et au cinéma.

Après s’être initié au monde du théâtre dans des productions paroissiales, c’est à la radio qu’il fera ses véritables débuts professionnels, notamment dans des radio-romans de Radio-Canada.

Il participe également aux balbutiements de la télévision québécoise, avec des rôles dans 14, rue de Galais, Cap-aux-sorciers, Les belles histoires des pays d’en haut et Radisson.

Jacques Godin dans <em>Radisson</em> (1957).

Parmi ses personnages les plus marquants, on note ceux de Victor Téoli dans Montréal P.Q. de Victor Lévy-Beaulieu et de Jérémie Martin dans Sous le signe du lion, un rôle qui lui vaudra deux Gémeaux en 1998 et 2001.

Un autre Gémeau lui reviendra pour son rôle de soutien dans la série Toute la vérité, en 2012. Il en avait aussi remporté un pour La charge de l’orignal épormyable, adaptation d’une pièce de Claude Gauvreau, en 1993.



Jérémie Martin dans <em>Sous le signe du lion</em>, lui vaudra deux Gémeaux en 1998 et 2001.

Le théâtre occupe également une place importante dans sa carrière, et Jacques Godin cumule les rôles sur scène dans plus d’une soixantaine de pièces au fil des ans, touchant aux répertoires d’Arthur Miller et d’Anton Tchekhov, mais aussi de Michel Tremblay, William Shakespeare, Eugene Ionesco, Victor Lévy-Beaulieu et Samuel Beckett, entre autres.

Son rôle de Lennie dans Des souris et des hommes de John Steinbeck au début des années 1970 fut sans doute l’un des plus marquants. Plusieurs personnes ont d’ailleurs témoigné sur les réseaux sociaux, mardi, pour raconter comment cette interprétation les avait touchées.

«Je me rappellerai toute ma vie de son rôle de Lennie dans le téléthéâtre Des souris et des hommes, en 1971, dans la peau d’un homme avec un âge mental de 5 ans, aux côtés d’Hubert Loiselle et Luce Guilbeault», a écrit sur Twitter le premier ministre François Legault.

Jacques Godin tient aussi un grand nombre de rôles au cinéma. On l’a entre autres vu dans Being at Home with Claude, La donation et La dernière fugue.

Élise Guilbault, Bernard Émond et Jacques Godin lors du lancement de La Donation, en 2009.

En 2010, il avait confié au quotidien La Presse qu’il était loin de penser à la retraite, malgré son âge, mais que pendant une certaine période de sa carrière, il a attendu en vain que le téléphone sonne.

«On ne m’engageait pas. Dans ma condition, je m’attends à ce que les gens m’appellent. Je me dis que j’ai travaillé sérieusement pendant ma vie. J’ai été deux ans sans travailler. Mais moi, ne pas travailler, ça me déprime. Beaucoup de gens de mon âge ont de la difficulté avec les plateaux, mais moi, je n’ai pas de problème», avait-il raconté.

À compter de 2013, il décide de plonger dans une nouvelle aventure et de jumeler scène et musique en devenant le narrateur des spectacles du jeune pianiste virtuose et compositeur de musique contemporaine Philippe Prud’homme.

En juin 2017, il est fait chevalier de l’Ordre national du Québec.

Le grand comédien laisse dans le deuil sa conjointe des 30 dernières années, la journaliste Brigitte Bougie, sa fille Pascale (Yvan Girard), sa petite-fille, Esther Girard-Godin (Xavier P-Laberge) et son arrière-petite-fille, Jeanne.

«Des souris et des hommes» (archives RC)
Mort d'un commis-voyageur (en 1962) (archives RC)