La Rive-Sud en toute liberté

Passé son générique secteur résidentiel à l’est, l’horizon s’ouvre sur le chemin Vire-Crêpes, et entre les bleuetières, on peine à croire que l’autoroute file tout juste derrière les collines.

HORS-PISTES / Pour celles et ceux qui, comme moi, ont l’habitude de presque toujours partir rouler de la maison du côté nord du fleuve, la Rive-Sud est souvent rayée de l’éventail des possibilités. Parce qu’il y a déjà tellement à faire au nord. Et puis, disons-le : because le pont.


Franchir la vénérable passerelle à cantilever n’est certainement pas l’expérience cycliste la plus zen qui soit, mais c’est moins pire que c’en a l’air. Trop craintifs, malgré tout? Mettez les vélos dans l’auto et traversez par voie motorisée (ou par le traversier) si vous ne résidez pas déjà de ce bord du Saint-Laurent qui fourmille de routes secondaires, de rangs et de chemins où l’on peut s’immerger dans la campagne et fuir les pistes cyclables parfois très encombrées. 

Car la beauté et la qualité générale du réseau dédié au cyclisme sur la Rive-Sud s’accompagnent de l’habituelle rançon de la gloire : le trafic.

On peut toutefois en emprunter des tronçons, s’en éloigner pour mieux plonger dans la campagne, puis y revenir. L’essentiel de cette chronique tient à cette idée : vous proposer non pas seulement des parcours, mais des secteurs, des routes où vous aventurer et qui constitueront l’épine dorsale du drôle de squelette que vous dessinerez sur une carte (réelle ou mentale) avant de donner vos premiers coups de pédale.

Entre deux Saints

Par exemple, pour sortir de Saint-Nicolas, vous pouvez tout aussi bien foncer sur la 132 vers l’ouest : l’accotement y est généralement sécuritaire. Ou alors vous pouvez remonter la route des Rivières par la piste cyclable qui la longe. 

L’objectif est cependant le même : partir à la découverte d’un superbe secteur, situé entre Saint-Nicolas et Saint-Étienne, traversé de routes magnifiques où l’on se pince parfois tellement le décor est splendide.

Le chemin Vire-Crêpes est de ceux-là : passé son générique secteur résidentiel à l’est, l’horizon s’ouvre et entre les bleuetières, on peine à croire que l’autoroute file tout juste derrière des collines que l’on imagine foulées par de chevaux sauvages. Le vélo est un excellent vecteur de l’imaginaire.

Au bout du Vire-Crêpes, la route Paquet permet d’aller rejoindre le chemin Demers, qui devient le chemin Terre-Rouge, dont je vous parlerai un peu plus loin. Vous pouvez aussi revenir sur vos pas en prenant Demers vers l’est, puis traverser la 20 sur Lagueux (attention aux travaux, mieux vaut rouler sur le large trottoir ici), avant d’obliquer vers le sud-ouest sur Craig. Suggestion ici : Craig est plus séduisante, son pavage plus lisse, mais il s’agit d’une route assez passante. Si vous avez envie de tranquillité, prenez le chemin Lambert. Oui, il longe l’autoroute, il est plus raboteux, mais il ne manque pas d’un certain charme et permet de rouler dans la plus totale tranquillité en observant les fermiers s’affairer dans les champs. 

À la rue du Cap, vous pouvez vous essayer vers le rang Gaspé, ou le rang Bois-Joly, mais soyez avisés : l’accotement est ici aussi rare que la bienveillance dans les réseaux sociaux. 

Il y a tant de possibilités ici que je peine à vous suggérer des parcours plus complets. Utilisez les outils à votre disposition : Google Maps et sa fonction Street View pour vous faire une idée de la surface comme du décor. Et pour dessiner vos parcours, je vous conseille l’application Strava, très efficace, et vous pourrez ensuite, si vous possédez un ordinateur de bord (Garmin ou Wahoo), y télécharger votre itinéraire pour ne pas passer votre temps à regarder votre téléphone en route.

S’éloigner des sentiers pavés

La plus grande richesse de la Rive-Sud, toutefois, ce sont ses routes non asphaltées. Des rangs à n’en plus finir où l’on découvre des coins inconnus, des ciels immenses et, principalement, des chemins pratiquement ignorés de l’automobile. 

Si certaines de ces routes sont un peu moins clémentes que d’autres, la plupart de celles qui se situent vers Laurier-Station, Issoudun et Sainte-Croix sont tout à fait praticables sans avoir besoin d’équipement particulier, sauf peut-être des pneus assez volumineux (28 mm ou plus, idéalement autour de 32 mm), dotés d’une bonne protection anti-crevaison. La conduite y est le plus souvent aussi aisée, sinon plus encore, que sur un sentier en poussière de pierre. 



Arrivé au chemin Terre-Rouge, vous pouvez virer sur une autre route de garnotte : de La Colline, et de là, rejoindre Saint-Antoine-de-Tilly par la 132. Vous pouvez vous en tenir à cela, puis rentrer par les nombreuses routes pavées, ou alors récidiver par la route des Rivières qui se prend un peu à l’ouest du village. 

À Issoudun, la route Baron est d’une conduite aisée, elle est longue et belle et déserte. Elle mène à la route Demers, dont le pavage s’efface éventuellement. 

Je pourrais continuer ainsi pendant des heures. Vous raconter aussi tous les paysages splendides aperçus plus au sud autour de Sainte-Agathe, ou dans Bellechasse, aux alentours de Saint-Damien-de-Buckland, où j’ai eu la chance de rouler au milieu de nulle part. 

On y conjugue le bonheur de pédaler et la tranquillité des chemins déserts. Et on injecte aussi une vivifiante dose d’aventure dans l’expérience, ignorant souvent ce qui nous attend au prochain carrefour. C’est ce qui explique l’engouement pour cette pratique : la liberté et le sentiment de voyager chez soi, si loin et si proche à la fois.

___

David Desjardins est chroniqueur à VéloMag. Il anime aussi la balado Radio Bidon. Chaque semaine, il propose une idée de sortie dans la grande région de Québec. Retrouvez tous ses itinéraires dans la section vélo de notre site.