R Aux dernières nouvelles, il n’y a pas actuellement de pénurie de masques N95 au Québec, mais les autorités se préparent à cette éventualité, comme partout dans le monde.
Le masque N95 est utilisé pour protéger les professionnels de la santé en cas de contact avec des pathogènes présents dans les aérosols produits par des individus infectés par des virus ou des bactéries. Il est constitué de polypropylène. Il génère de l’électricité statique qui lui permet de retenir des très petites particules, jusqu’à 0,3 micromètre de diamètre. Un masque respirateur est appelé N95 quand il répond à la norme édictée par le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) américain. Pour être approuvé, il doit pouvoir filtrer au moins 95 % des particules dans l’air exemptes d’huile (d’où le N) lors de mises à l’essai avec des particules de 0,3 micromètre de diamètre. Il doit être ajusté très fermement au visage et n’est pas efficace si la personne porte une barbe.
Le masque doit être remplacé au plus toutes les huit heures, ou quand on sort d’une zone à haut risque, ou quand il devient trop gênant pour la respiration. Selon le NIOSH, il n’y a pas de méthode permettant de déterminer si un masque est encore efficace ou pas, et de nombreux paramètres peuvent influencer la vitesse à laquelle il pourrait perdre de son efficacité : la contamination ambiante, la température et l’humidité, le fait que la personne qui le porte touche plus ou moins au masque avec des mains ou des gants plus ou moins contaminés, etc.
Dans le cadre de ses travaux de préparation à une pandémie, le NIOSH avait émis un avis détaillé sur les meilleures pratiques à adopter pour économiser des masques, qui sert aujourd’hui de référence à beaucoup de gens. Les Centers for Disease Control and Prevention (CDC) américains proposent aussi une stratégie à adopter dans le contexte actuel.
L’étude dont vous parlez est en fait un bilan des connaissances réalisé en temps réel par des médecins chercheurs de l’Université Stanford, destiné à aider les anesthésistes dans leur prise de décision dans le contexte de la COVID-19. La version que j’ai consultée est celle du 25 mars, mais cela vaut la peine de vérifier les mises à jour. Leur premier conseil aux soignants : suivre les directives de leur hôpital.
Une méthode de lavage efficace pour les masques doit à la fois détruire le virus sur le masque, ne pas être toxique pour la personne qui va porter le masque nettoyé et ne pas endommager la capacité du masque à filtrer les particules.
Les chercheurs de Stanford rapportent dans un tableau les essais réalisés récemment par la compagnie 4C Air avec différentes techniques. Passer le masque 30 minutes à l’air chaud à 70 degrés, ou 10 minutes à la vapeur d’eau bouillante semble efficace pour éliminer le virus, et préserver la capacité du masque à filtrer l’air. La désinfection avec le chlore ou de l’alcool a par contre grandement réduit l’efficacité des masques, et les chercheurs disent aux anesthésistes de ne pas procéder de cette manière.
Ils rapportent aussi les résultats d’une étude publiée en 2009 sur cinq méthodes de décontamination des masques N95 — preuve que le sujet est dans l’air, si on peut dire, depuis déjà un certain temps. Les chercheurs avaient alors testé notamment la décontamination par des traitements aux micro-ondes, au chlore, au peroxyde d’hydrogène, aux UV et à l’oxyde d’éthylène, mais sans évaluer la charge virale résiduelle.
Tout ceci est cependant susceptible d’évoluer, car deux études ne constituent pas une preuve très solide.
Vendredi dernier, le Journal of the American Medical Association a lancé un appel à la communauté scientifique pour réaliser rapidement de nouvelles études à ce sujet et les publications scientifiques vont sans doute se multiplier rapidement, car l’enjeu est crucial.
En résumé, donc, oui, il y a probablement des méthodes efficaces pour réutiliser les masques, seulement, en date d’aujourd’hui, on n’a pas encore les données fiables qui permettraient d’identifier la meilleure technique, mais ça s’en vient.
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