COVID-19: le ralentissement économique a-t-il un effet sur les GES?

Q : «D’un point de vue positif, avec la réduction des activités due à la COVID-19, il y aura surement un impact favorable sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Commence-t-on à avoir de l’information à ce sujet? Et d’un point de vue négatif, le réchauffement climatique aurait-il un impact sur l’apparition de pandémies? Pensons au SRAS et au H1N1», demande Daniel Guilbault, de Saint-Augustin-de-Desmaures.


R : La pandémie paralyse la planète au complet et confine les gens chez eux. Du point de vue environnemental, il serait tentant de croire que l’important ralentissement économique aide à réduire le niveau de pollution. Dans les faits, oui… mais pour un moment seulement.

Des chercheurs de l’Université Bocconi, en Italie, ont rapporté une amélioration de la qualité de l’air en examinant les données du satellite Sentinel-5P de l’Agence spatiale européenne. Celui-ci a enregistré les concentrations en dioxyde d’azote (NO2), un gaz polluant émis notamment par les véhicules et les centrales au charbon. Entre décembre et mars, il y a eu une diminution de 10 à 30% des concentrations en NO2 au-dessus de la plupart des grandes villes en quarantaine de Chine et d’Italie, ainsi que des particules fines.

Claude Villeneuve, professeur et directeur de la Chaire en éco-conseil à l’Université du Québec à Chicoutimi, constate aussi ce ralentissement en étudiant les données compilées par la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA). «On remarque un plateau entre décembre et février correspondant à la diminution d’à peu près 25% des émissions de carbone en Chine. On est présentement à 414 ppm au niveau global alors qu’on devrait être à environ 415 ppm en se fiant aux tendances», explique-t-il.

Selon lui, dépendamment de la longueur de cette pause forcée, 2020 pourrait être une année où il n’y aura pas de hausse globale de nos émissions de gaz à effet de serre. Cependant, le chercheur souligne qu’il est très difficile de prévoir ce qui se passera au cours des prochains mois.

Lors de la récession économique mondiale de 2007, il y a également eu une diminution des émissions de gaz à effet de serre, rappelle M. Villeneuve. Mais ces périodes d’accalmie sont temporaires.

«La réaction semble unanime de la part des gouvernements : ils promettent de relancer la machine une fois la pandémie passée pour rattraper la croissance perdue». Cela reste à voir, mais la reprise frénétique des activités économiques devrait faire remonter les émissions polluantes au même point qu’avant la pandémie.

Effet des changements climatiques

Les changements climatiques ont un effet certain sur la façon dont les maladies infectieuses se propagent.

C’est surtout le cas pour les pathogènes transmis par des vecteurs (moustiques ou tiques), comme ceux qui causent la malaria, le Zika ou la maladie de Lyme.  L’aire de répartition de ces vecteurs s’agrandit avec le réchauffement climatique.

L’effet est différent pour les virus propagés par les humains comme ceux de la grippe et de la COVID-19. Il n’est pas possible d’établir de lien entre les changements climatiques et l’émergence de ce nouveau coronavirus.

Plusieurs études suggèrent toutefois que le risque d’épidémie augmente à mesure que des régions deviennent moins habitables, forçant la migration de certains animaux, comme les chauve-souris. La destruction des écosystèmes et en particulier la déforestation peut aussi accélérer la transmission de maladies, en augmentant les contacts avec la faune sauvage.

Enfin, dans une étude publiée en 2019 dans Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), des chercheurs japonais démontraient que l’exposition de souris à une température ambiante plus élevée (36 °C)  «altérait leur réponse immunitaire face à l’infection du virus de la grippe». Bien que l’étude ait été réalisée chez la souris, les scientifiques pointent vers de possibles problèmes de santé publique chez l’humain dans un monde de plus en plus chaud.

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