CHU de Québec et vapeur d’une usine polluante

L’incinérateur de la Ville de Québec

POINT DE VUE / En novembre 2019, la direction du CHU de Québec-Université Laval annonçait son intérêt d’établir une entente d’achat de vapeur en provenance de l’incinérateur de la Ville de Québec pour son nouveau complexe hospitalier (NCH). La direction veut ainsi éviter une nouvelle source d’émission supplémentaire de gaz à effet de serre (GES).


Si une telle initiative mérite d’être saluée parce qu’elle contribuera éventuellement à la réduction du réchauffement climatique, elle ne contribuera toutefois pas à réduire les polluants cancérigènes sortant des cheminées de l’incinérateur. Bien que les mesures de contrôle utilisées par la Ville de Québec se limitent actuellement à deux campagnes d’échantillonnages de douze heures équivalents à une journée par année, donc permettant d’avoir un portrait partiel de ce qui sort des cheminées, ces mesures nous révèlent malgré tout des dépassements récurrents de polluants toxiques. Entre 2015 et 2018, de tels dépassements ont eu lieu et amené le ministère de l’Environnement à émettre trois avis d’infraction pour non-respect de la qualité de l’air. Et voilà que de tels dépassements se sont répétés récemment lors des campagnes d’échantillonnage de juin et septembre 2019 selon un article publié par Le Soleil. 

L’incinérateur de Québec a été construit en 1974, soit il y a plus de 45 ans. Il s’agit donc d’une vieille bagnole que la Ville de Québec a reprise en gestion en 2015 de TIRU, oui la même multinationale qui a mal géré ces centres de tri et qui doit maintenant les fermer parce qu’elle a misé sur le minimum de triage pour un maximum de profits en exportant pendant des années ces matières de faible qualité en Chine et en Inde. Depuis que la Ville de Québec gère à l’interne ce vieil équipement, et sous la pression des citoyens, celle-ci a mis près d’une centaine de millions pour le moderniser et le rendre plus sécuritaire. Malheureusement, les derniers dépassements toxiques démontrent que les solutions mises de l’avant par la Ville ne fonctionnent pas parce que les solutions préconisées ne s’attaquent pas à la source du problème. Une solution confirmée par un expert engagé par la Ville de Québec qui lors du Comité plénier tenu le 22 novembre affirmait ce qui suit : «moins d’heures d’opération des fours donc moins de pollution atmosphérique».

La Ville de Québec doit donc développer une stratégie plus performante de réduction des volumes des matières à incinérer en construisant, à l’extérieur du quartier Limoilou, deux centres de tri avant incinération (l’un à l’ouest et l’autre à l’est de la ville). Ces équipements permettront ainsi de retirer de l’incinération les matières suivantes : celles que l’on peut retourner dans la chaîne de production économique, celles les plus toxiques qui ne doivent pas être incinérées, ainsi que celles qui sont incombustibles et qui nuisent au fonctionnement de l’incinérateur.

Comme l’une des missions principales du NCH sera de lutter contre le cancer, la direction du CHU de Québec-Université Laval se doit donc, en cohérence avec cette mission, de suspendre son projet d’achat de vapeur de l’incinérateur tant que la Ville de Québec n’aura pas mis en place toutes les mesures nécessaires.