La liberté d’association
La liberté d’association protège le droit collectif d’un parti politique d’exister. Elle pourrait être interprétée comme incluant le droit de fixer les règles relatives à la présentation des candidatures. Si cette liberté était interprétée ainsi, l’Assemblée nationale pourrait, comme le lui permet l’article 9.1 de la Charte québécoise, en fixer la portée et en aménager l’exercice par l’imposition d’une zone de parité en tout respect des valeurs démocratiques et du bien-être général des citoyens, et en particulier des citoyennes du Québec. La restriction de cette liberté constituerait aussi, en application de l’article 1er de la Charte canadienne, une limite raisonnable dont la justification puisse se démontrer dans une société libre et démocratique. Le fardeau de la preuve de la raisonnabilité pourra être relevé par l’État. À l’étape de la détermination de l’objectif législatif, il pourrait être démontré que l’intérêt public général serait servi par l’instauration d’une zone de parité. Dans le cadre de l’analyse de la proportionnalité, le lien rationnel, l’atteinte minimale et la démonstration de la supériorité des avantages positifs sur les effets négatifs pourraient être prouvés.
Le droit de se porter candidat
S’agissant du droit de se porter candidat reconnu à l’article 22 de la Charte québécoise et à l’article 3 de la Charte canadienne, il est assuré du fait qu’une personne désirant être candidat puisse présenter une candidature indépendante. Le projet de loi no 39 prend d’ailleurs le soin d’élargir la possibilité d’une telle candidature aux nouveaux sièges de région. Si le droit de se porter candidat était interprété comme incluant le droit de le faire au sein même d’un parti politique, la restriction de ce droit constituerait aussi une limite raisonnable dont la justification se démontre dans une société libre et démocratique.
Le droit à l’égalité
Le droit à l’égalité garanti à l’article 10 de la Charte québécoise et à l’article 15 de la Charte canadienne comprend le droit de ne pas faire l’objet d’une discrimination en fonction du sexe. Nous sommes d’avis que les dispositions instituant une zone de parité résisteraient à une contestation fondée sur ces deux articles. Si une distinction est créée entre les hommes et les femmes et que le motif de distinction qu’est le sexe compte parmi ceux énumérés à l’article 10 Charte québécoise, il n’existe pas un préjudice ayant pour effet de détruire et compromettre la reconnaissance, en pleine égalité, du droit des hommes à se porter candidat.
Cela serait d’autant plus vrai que le paragraphe 2 de l’article 15 de la Charte canadienne prévoit que le droit à l’égalité «n’a pas pour effet d’interdire les lois, programmes ou activités destinés à améliorer la situation d’individus ou de groupes défavorisés, notamment du fait de leur [...] sexe […]. Si une future loi comprenait des dispositions instaurant une zone de parité, elles feraient de celle-ci une loi destinée à améliorer la situation des femmes et ne serait donc pas interdite. Cette vue est renforcée par le fait que le Québec s’est déclaré lié par la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes dont le paragraphe 1 de l’article 4 prévoit que «[l]’adoption par les […] de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes n’est pas considérée comme un acte de discrimination […]».
Pour que l’Assemblée nationale du Québec devienne une institution véritablement paritaire dans sa composition, l’instauration d’une zone de parité est éminemment souhaitable. Aucun obstacle constitutionnel ne saurait être invoqué pour ne pas inclure une telle mesure dans la future Loi instaurant un nouveau mode de scrutin, car d’obstacle constitutionnel, il n’en existe pas.