Meurtre à Sainte-Foy: un conjoint jaloux et contrôlant

Eustachio Gallese a été arreté jeudi et accusé du meurtre d’une masseuse érotique. Il avait tué sa conjointe le 21 octobre 2004.

«Plote un jour, plote toujours». Ce sont les mots qu’Eustachio Gallese — accusé jeudi du meurtre de Marylène Lévesque — a écrits sur le mur de sa chambre, juste après avoir tué sa conjointe de plusieurs coups de couteau, le 21 octobre 2004.


Le procès devant jury de Gallese, accusé du meurtre non prémédité de Chantal Deschênes, a duré moins de deux semaines à la fin de l’automne 2006. Toutes les notes sténographiques tiennent dans une seule boîte.

On ressort de la lecture avec l’image d’un couple qui se déchire, d’un conjoint jaloux et contrôlant, de deux fillettes qui ont failli voir l’horreur.

Chantal Deschênes, barmaid de 32 ans, et Eustachio Gallese, directeur de la restauration âgé de 36 ans, se sont connus en travaillant à l’Hôtel Québec en 2003. Leur relation s’officialise à Noël et ils emménagent ensemble dans le logement de Chantal, sur le boulevard Pie-XII à Sainte-Foy.

Chantal est maman de deux petites filles. Eustachio Gallese est séparé et père de trois enfants. Gallese a été déclaré coupable de voies de fait sur son ex-conjointe en 1997 en Ontario et condamné à 7 jours de prison.

Les premiers mois se passent bien. Celui que l’on surnomme «Stach» emmène ses enfants et celles de Chantal les dimanches pour patiner ou jouer dans les manèges. 

La relation du couple se dégrade au fil des mois. Pour plusieurs raisons, différentes selon les acteurs du drame.

Eustachio Gallese témoignera qu’il avait un problème d’alcool, travaillait trop et était dépressif. Il consultera médecin et psychologue à l’automne 2003 et aura d’ailleurs des documents pour un arrêt de travail.

Selon Gallese, Chantal Deschênes rentre souvent vers 6h du matin, soit beaucoup plus tard que la fin de son quart de travail au bar de l’Hôtel Québec. Il n’aime pas cela. Il reproche aussi à sa conjointe d’avoir des conversations vulgaires avec d’autres employés.

Chantal Deschênes se confie à quelques reprises à sa mère, à sa grand-mère et à une collègue de travail. «Stach» est jaloux, dit Chantal, et la surveille constamment. Quelques jours avant sa mort, Chantal dit à son amie Gisèle Brisson qu’elle a peur de laisser son conjoint, car elle craint de perdre son emploi. Elle ne s’est jamais plainte de violence physique.

La grand-mère de Chantal a témoigné que sa petite-fille avait peur de son conjoint violent. Elle voulait le laisser, mais il refusait de partir, dira la grand-mère. La dame lui avait conseillé de faire venir la police. Chantal avait refusé parce qu’elle avait trop peur.

Selon la grand-mère, «Stach» avait menacé de «défaire le visage» de sa conjointe, que personne ne puisse voir ses yeux, sa beauté.

«Il ne voulait pas que personne la regarde. Et il ne voulait pas qu’elle regarde les clients», résume la grand-mère.

«Jamais personne t’aura»

La mère de Chantal a témoigné de propos inquiétants que Gallese aurait servis à sa fille. «Si tu veux que je parte, jamais personne t’aura.»

Le 20 octobre 2004, la veille du drame, le chauffeur de taxi Louis Plante a reconduit Chantal Deschênes comme il avait souvent l’habitude de le faire. La femme, habituellement joviale, est nerveuse. Elle lui dit qu’elle vient de «casser» avec son ami et qu’ils se sont engueulés. Elle lui dit qu’il était jaloux.

Eustachio Gallese et Chantal Deschênes ont finalement dormi ensemble le soir du 20 octobre dans le logement sur Pie-XII.

Les deux petites filles sont parties pour l’école tôt le matin, comme à l’habitude.

Eustachio Gallese a témoigné au procès. Il a raconté la scène insoutenable. «L’apocalypse, c’est ça qui est arrivé», dit-il à son avocat, Me Michel Croteau, aujourd’hui retraité.

Selon Gallese, sa conjointe, très fâchée contre lui, aurait voulu le frapper avec un marteau alors qu’il était toujours au lit. Il dit avoir reçu un coup. L’homme, qui mesure six pieds, réussit à empoigner le marteau et c’est lui qui donne plusieurs coups à sa conjointe, une femme de cinq pieds et cinq pouces. 

Il va ensuite à la cuisine et revient avec deux couteaux de boucherie. Il poignarde Chantal au visage et au thorax en utilisant ses deux mains. La pathologiste n’a jamais pu déterminer avec précision le nombre de coups. Elle sait toutefois que la victime ne s’est jamais levée du lit après l’agression et qu’elle a aussi été étranglée.

Lorsqu’il constate que Chantal Deschênes est morte, Eustachio Gallese s’assoit sur le lit. Il recouvre le corps avec la douillette. L’homme saisit un crayon et va écrire les mots «plote un jour, plote toujours», sur le mur, près de la porte. 

En panique, il se tient la tête à deux mains. Il voit du sang partout dans la pièce.

Gallese témoigne qu’il pense à se suicider. Il écrit aussi un mot d’adieu à ses trois enfants et à leur mère.

Il recouvre la fenêtre avec du tissu pour éviter que les filles voient la scène en rentrant de l’école pour dîner.

Lorsque les petites arrivent, Eustachio Gallese les intercepte dans l’entrée et leur annonce qu’il les amène au restaurant. Leur mère est partie magasiner, dit-il. 

Après la sortie au McDonald’s, «Stach» reconduit les filles à l’école. 

Il se rend ensuite chez son ex-femme à Saint-Nicolas et c’est de là qu’il appelle le 9-1-1 en disant vouloir confesser un crime.

Lorsque le policier arrive, Gallese s’approche de lui en tendant les mains en croix et dit : «Arrêtez-moi». Le policier demande pourquoi. Il répond : «Je viens de tuer quelqu’un»

Des policiers de Québec iront chercher les deux fillettes à l’école tandis que des collègues se rendent au logement et que d’autres amènent Eustachio Gallese pour l’interroger. Il est calme, en contrôle et veut parler. Les policiers doivent lui demander d’attendre d’être dans la salle de l’interrogatoire vidéo pour livrer son récit.

Au procès, la défense a plaidé que l’accusé se trouvait dans un état colérique et incontrôlable tel qu’il ne pouvait formuler l’intention de tuer et qu’il est coupable d’homicide involontaire. 

La procureure de la Couronne Me Carmen Rioux a rappelé aux jurés les peurs confiées par la victime à ses proches. Elle a souligné le fait que le corps de Chantal ne portait aucune plaie de défense. Et que l’accusé, qui disait avoir vu noir après le coup de marteau, n’avait même pas de fracture à la main.

Après seulement 24 heures de délibérations, le jury donne raison à la Couronne et déclare Gallese coupable de meurtre au second degré.

Le juge Jacques J. Lévesque le condamne à la prison à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 15 ans.

«Je veux m’excuser à la famille. Je ne leur demande pas pardon, juste m’excuser», seront les dernières paroles de Eustachio Gallese devant le tribunal.