Chronique|

Laurence à l’urgence

Laurence Leboeuf, qui a signé un contrat pour quatre saisons, incarne dans «Transplant» la Dre Magalie Leblanc, à sa deuxième année de résidence.

CHRONIQUE / Quand on compare, on ne se console pas toujours. Tenez, par exemple, en début de semaine, j’ai mis le pied sur le plateau de tournage de la série médicale anglophone «Transplant», à Ville LaSalle. Et ce que j’y ai vu m’a donné l’impression que je venais de passer à la douane pour me retrouver aux États-Unis. C’est clair ici qu’on joue dans d’autres ligues.


Dans ce bâtiment où il se tourne des séries depuis des décennies, on a recréé l’étage complet d’un hôpital. En me promenant dans les couloirs, je me serais cru dans une véritable salle d’urgence, à la fine pointe de la technologie. C’est gigantesque : 28 000 pieds carrés. Outre les caméras, rien n’indique qu’on est ailleurs : des ascenseurs, des lits, des appareils comme on en voit dans De garde 24/7. Même le hall d’entrée laisse entrer la lumière du soleil... recréé par des spots. Les consultants qui viennent s’assurer de la crédibilité des manipulations, de vrais médecins, ont dit qu’ils viendraient y travailler n’importe quand, tellement c’est réaliste. Ça donne (presque) envie d’être malade.

Transplant, qui sera diffusée le printemps prochain en anglais à CTV et en français à VRAK, raconte l’histoire de Bashir Hamed, «Bash» pour les intimes, médecin syrien dont les diplômes ne sont pas reconnus au Canada. Il devra se résoudre à devenir plongeur, jusqu’à ce qu’une tragédie lui permette de faire ses preuves, et d’œuvrer parmi le service d’urgence de l’hôpital York Memorial à Toronto, un des meilleurs au pays. Ce rôle principal a été confié à Hamza Haq, que reconnaîtront les habitués de la série Quantico.

Deux Québécoises font partie de la distribution, à commencer par Laurence Leboeuf, qui retrouve l’esprit d’une série médicale, elle qu’on a vue dans Trauma chez nous. Sauf que les moyens sont pas mal plus importants. En matériel mais aussi en temps de tournage, un luxe qu’elle ne trouve plus sur les plateaux québécois. «C’est de pire en pire, tu le vois. Ici, on fait des films en 18 jours et on tourne un épisode de série en quatre ou cinq jours. Faut juste se reprogrammer autrement. Sur Transplant, on a huit jours par épisode. On se sent un peu plus libre d’expérimenter certaines choses. On peut se tromper. Il y a une liberté», me confie-t-elle, entre deux scènes. Pourtant, l’actrice qu’on a vue dans la version anglaise de 19-2 apprécie trop sa vie au Québec pour envisager de ne tourner qu’en anglais à Toronto ou ailleurs.

Laurence Leboeuf, qui a signé un contrat pour quatre saisons, incarne la Dre Magalie Leblanc, à sa deuxième année de résidence. «C’est une première de classe, qui suit les règles à la lettre. Je l’appelle mon Hermione Granger! “Mags” parle vite, elle connaît tout, est très empathique, se donne beaucoup dans son travail.» Peut-être même trop, ajoute l’actrice, qui se doublera elle-même dans la version française, Dieu merci. Comme elle était traumatologue dans Trauma, et qu’elle joue maintenant une urgentologue, elle a dû réapprendre toutes les manipulations. «L’hôpital, c’est un puits sans fond d’histoires de courage, de pardon, d’acceptation, de deuil, d’amitié. On parle d’émotions vives et crues. J’ai un respect infini pour les gens qui travaillent dans ce domaine.»

Parmi le personnel du York Memorial, vous reconnaîtrez aussi Ayisha Issa, la Brittany Sizzla d’Unité 9, dans le rôle d’une ambitieuse résidente chirurgienne, June Curtis. L’actrice, dont la langue maternelle est l’anglais, a quitté Montréal il y a quatre ans pour s’installer à Toronto dans le but de décrocher plus de rôles. Athlète en jiu-jitsu brésilien, elle a dû repartir de zéro après avoir connu d’importants ennuis financiers. Elle a depuis additionné les métiers, dans les domaines des jeux vidéo, des soins du visage, et même comme agente de sécurité dans une boîte de nuit et propriétaire de son propre gym. Née d’une mère jamaïcaine et d’un père ghanéen, Ayisha est fière de participer à une série aussi ancrée dans la diversité, loin des stéréotypes, avec comme toile de fond le sort des réfugiés syriens. «On regarde ça de loin à la télé, mais c’est important de raconter ces histoires-là. On a parfois peur de le faire, parce que c’est tellement controversé, mais c’est dommage. Transplant le raconte de manière très humaine.»

Pour vous donner une idée, le budget d’une saison de 13 épisodes d’une heure de Transplant avoisine les 28 millions de dollars, alors qu’on ne met pas plus de six à sept millions au Québec, sauf dans des cas rares. Il faut dire que Transplant, destinée à CTV, dispose en grande partie de fonds américains puisqu’elle est financée par NBCUniversal International Studios. La maison de production Sphère Média Plus (Une autre histoire, Les honorables) complète ce partenariat. Parmi les défis de la construction du décor, qui s’est échelonnée de février à juin dernier, il a fallu refaire les planchers, installer de véritables plafonds, en plus de créer de toutes pièces un système de gicleurs. Félicitons-nous : l’équipe qui a conçu le décor et les techniciens sont presque tous québécois.