Bistro La Goulette: l’invitation au voyage

Tajine «de saison», garni de nombreux légumes: carottes du jardin, haricots verts, poivron orange, généreux quartier de courgette

CRITIQUE / Pour s’envoler au bord de la Méditerranée, portés par une brise épicée, on met le cap sur le Bistro La Goulette!


Parmi les nombreuses cuisines du monde, je dois avouer un faible pour celles de l’Inde et du Maghreb. Vous comprendrez que je suis une fan d’épices, surtout quand elles sont si soigneusement agencées qu’elles apportent une profondeur insoupçonnée à un plat. En plus, quoi de plus réconfortant qu’un mets qui embaume le cumin, la coriandre et la cannelle? Quand le blues automnal s’installe, servez-moi un tajine et je serai guérie.

C’est justement par un jeudi soir frisquet qu’Annie, Bénédicte et moi nous attablons au Bistro La Goulette, établi dans Montcalm depuis 2017, après neuf ans dans Limoilou. La déco est plus chic que dans l’ancien local, avec sa tapisserie noire et blanche richement ornementée et ses murs sarcelle qui font rêver de mer et d’embruns. Je trépigne en songeant au tajine qui m’attend, même si je passe près de me laisser séduire par la pastilla au poulet, amandes et cannelle, dont je me suis régalée le printemps dernier. Des keftas? Des brochettes? Ou cet intrigant couseïla, un couscous aux fruits de mer façon paëlla? Je résiste aux tentations et m’en tiens à ma première idée. Seule déception: le serveur m’apprend que le tajine à la cuisse de pintade que je désirais n’est pas disponible. Je me rabattrai donc sur le traditionnel poulet.

Thérapie aromatique

Avant le moment tant attendu, une entrée en matière variée nous met en appétit – en plus de nos pilsners Beirut, dont la fraîcheur houblonnée stimule les papilles. L’«ardoise libanaise» combine diverses entrées froides, parmi lesquelles se démarquent le falafel parfumé de basilic, le houmous onctueux, le baba ganoush à la surprenante saveur fumée (les aubergines passent sur le gril avant d’être réduites en purée), et la salade, très fraîche, de concombre et fenouil. Le tout est servi avec des triangles de pitas et de petits pains ronds. En prime, nous nous partageons un brick à l’œuf. Classique de la cuisine tunisienne, ce chausson est constitué d’une pâte frite – forcément un peu grasse – contenant du thon, de la mozzarella fondue, des câpres, des olives vertes, du persil et un œuf bien coulant. De beaux contrastes de textures.

En passant la porte de la petite salle joliment décorée, on a tout de suite l’impression d’être loin de Québec et de l’automne, sentiment qui sera renforcé par les plats dégustés au fil du repas.

Le voici, le voilà, ce plat de terre cuite tant convoité, qui arrive sur des notes de musique traditionnelle moyen-orientale participant à l’ambiance chaleureuse. Le serveur soulève le couvercle avec juste assez de cérémonie, et je suis ravie de découvrir un tajine «de saison», garni de nombreux légumes : carottes du jardin, haricots verts, poivron orange, généreux quartier de courgette. Le plus beau dans tout ça? Leur cuisson, impeccablement al dente. Il y a aussi dans ce ragoût berbère des oignons perlés, des olives vertes et Kalamata, des tomates cerises et, quelle bonne idée, une figue entière, qui apporte une contribution sucrée bienvenue. Cerise sur le sundae: un gros quartier de citron confit, bien fondant, vient ensoleiller ce plat déjà coloré. Tout ça fleure bon le safran, le gingembre, la coriandre et la cannelle, dans un équilibre plus qu’heureux. Le poulet, lui, est juteux, et il ne faut pas oublier la semoule et les pois chiches qui patientent sagement dans leur coin. Disparu, le spleen de septembre, je me retrouve sous le soleil plombant de Marrakech – en plus, j’aurai un lunch pour demain, car ma portion est trop copieuse pour que j’en vienne à bout.

Mes deux comparses passent elles aussi de bons moments, Annie avec un tajine à la morue et aux crevettes dodues, Bénédicte en compagnie d’un couscous au jarret d’agneau, où le goût juste assez corsé de la viande – qui vient de Nouvelle-Zélande – se fond dans celui des épices. 

Le voyage au pays des odeurs délicieuses est loin d’être terminé, car au dessert, nous découvrons une petite merveille: la bouza, une crème pâtissière parfumée à l’eau de fleur de géranium, verte et fraîche. L’été dans une bouchée. Le baklava s’en trouve complètement éclipsé (surtout qu’il pourrait être plus généreux en miel et en eau de fleur d’oranger).

Quelques gorgées de thé à la menthe, et l’escapade arrive à son terme. On en ressort étonnamment plus légères, comme au retour des vacances.

Propriété du chef d’origine tunisienne Kais Darragi, le Bistro La Goulette propose l’un des meilleurs tajines en ville.

AU MENU

Bistro La Goulette
56, boul. René-Lévesque O.
581 300-6730

bistrolagoulette.com

> Ouvert le soir du mardi au dimanche, et le midi du mardi au vendredi

Cuisine maghrébine

Bouteilles de vin de 28$ à 42$
Entrées de 5$ à 13$
Plats de 20$ à 30$

Coût de l’addition pour deux avant taxes, pourboire et alcool: 67,50$ (pour deux entrées, deux plats, deux desserts et deux thés)

Bravo : pour les ingrédients de qualité, l’impeccable dosage des épices et les nombreuses formules économiques de la carte.
Bof : le thé à la menthe servi dans une cafetière de réchaud gâche un peu l’authenticité de l’expérience.