Projet de loi 31: l’amorce d’un virage important

POINT DE VUE / Les pharmaciens sont reconnus par les Québécois comme étant les professionnels des soins de santé les plus accessibles et sont des plus appréciés. En déposant cette semaine à l’Assemblée nationale le projet de loi 31, la ministre de la Santé, Danielle McCann, pose un geste concret pour faciliter l’accès aux soins de santé à l’échelle provinciale. Ainsi, la population pourra tirer davantage profit des compétences des pharmaciens qui seront dorénavant mieux utilisées.


Ce projet de loi contient des éléments prometteurs. Les patients auront accès à un plus grand nombre de services de santé, dont la vaccination, la prescription de médicaments en cas d’urgence et différents types d’évaluation par le pharmacien afin d’assurer l’usage approprié des médicaments. Ce projet témoigne également de l’engagement de la ministre de la Santé à poursuivre le virage du décloisonnement professionnel en accordant aux pharmaciens la responsabilité de poser davantage de gestes cliniques, à l’instar de plusieurs juridictions au Canada et dans le monde. Il faudra toutefois attendre le dépôt de l’ensemble des règlements qui accompagneront ce projet de loi avant de pouvoir mesurer l’ampleur des impacts sur l’accès aux soins pour les patients, et espérer que le tout se fasse dans les plus brefs délais.

L’accès uniforme aux nouveaux services: un facteur de succès et une question de principe

Les changements législatifs proposés auront pour effet d’éviter à des patients de se rendre à l’urgence ou à la clinique lorsque leur condition ne requiert pas une prise en charge médicale immédiate et favoriseront un meilleur accès aux soins de première ligne, tout en améliorant la prévention en santé publique. Par ailleurs, ils devront donner le coup d’envoi à une contribution plus importante des pharmaciens aux soins dans les établissements de santé, notamment dans les centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD).

Toutefois, un enjeu subsiste pour assurer la mise en œuvre optimale et l’atteinte de ses objectifs d’accès. En effet, les patients qui bénéficient des services de santé en pharmacie communautaire sont assujettis au paiement de frais, alors que ceux qui se rendent en hôpital ou en clinique pour les mêmes services les reçoivent gratuitement. Or, si le gouvernement souhaite que les patients se tournent vers les pharmaciens et qu’il a l’ambition d’avoir un impact réel sur l’accès, il devra éliminer cette barrière qui représente une iniquité pour les patients.

Une suite attendue

Parallèlement au dépôt du projet de loi, des discussions sont actuellement en cours entre les ordres professionnels concernés afin de prévoir la suite. Nous souhaitons que les changements à venir permettent une avancée vers le plein exercice des compétences des pharmaciens en établissement de santé et en pharmacie communautaire. Les programmes de formation universitaire actuels, tant au premier qu’au deuxième cycle, préparent bien les pharmaciens à assumer ces nouveaux rôles et au-delà. Ces professionnels détiennent la formation et l’expertise pour permettre une pratique avancée de la pharmacie et générer plus d’efficience.

Les pharmaciens de tous les milieux devront prévoir une réorganisation des façons de faire afin de mettre en place ces nouvelles pratiques. Les instances du milieu de la pharmacie travaillent en étroite collaboration et en respect de leur mandat pour s’assurer que les nouvelles activités soient bien implantées sur le terrain. Le domaine de la pharmacie vit actuellement un changement de modèle. Le gouvernement doit en être conscient pour permettre la prise de ce virage qui répond à un grand besoin clairement identifié par les patients et soutenu largement par la population. Si on leur en donne les moyens, les pharmaciens détiennent la formation et l’expertise pour en faire davantage.

Bertrand Bolduc, président, Ordre des pharmaciens du Québec

Jean Thiffault, président, Association québécoise des pharmaciens propriétaires

François Paradis, président, Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec

Karina Savoie, présidente, Association professionnelle des pharmaciens salariés du Québec

Lyne Lalonde, doyenne, Faculté de pharmacie de l’Université de Montréal

Jean Lefebvre, doyen, Faculté de pharmacie, Université Laval

Denis M. Roy, président, Association des bannières et des chaînes de pharmacies du Québec

Louis-Philippe Daoust, président, Association des étudiants en pharmacie de l’Université de Montréal

Julie Desjardins, présidente, Association générale des étudiants en pharmacie de l’Université Laval