Le film de la semaine: Dumbo ***

Dumbo effectue son premier vol dans le chapiteau...

CRITIQUE / L’expression «bête de cirque» prend tout son sens dans Dumbo. Dans la vision de Tim Burton du classique d’animation de Disney (1941), l’éléphanteau aux larges oreilles est exploité sans vergogne et privé de la présence la plus élémentaire de sa mère pour amuser les foules. Une version malgré tout amusante et attendrissante qui s’attaque avec doigté à des thèmes plus sérieux qu’ils en ont l’air.


L’histoire de Dumbo est, rappelons-le, assez simple. Mais Burton a pris plusieurs libertés avec cette nouvelle mouture en prises de vues réelles, à partir de l’essentiel : l’éléphanteau vole grâce à ses oreilles surdimensionnées.

L’éléphanteau est «adopté» par deux jeunes précoces (Nico Parker et Finley Hobbins), en deuil de leur mère. Mais pas totalement orphelins : leur père revient de la guerre en 1919, manchot. Holt Farrier (Colin Farrell), un cow-boy vedette dans le cirque itinérant en difficultés financières de Max Medici (Danny DeVito), est réduit à prendre soin des éléphants.



Ce sont les enfants qui découvrent le don de Dumbo. L’argent des recettes permettra, croient-ils, de réunir l’éléphanteau et sa mère Jumbo.

Les choses se compliquent singulièrement lorsque toute la troupe est achetée par V. A. Vandemere (Michael Keaton). «L’empereur du divertissement» veut faire voler Dumbo en compagnie de la trapéziste française Collette Marchant (Eva Green) dans son Dreamland Circus, à New York.

Notez ce nom de «pays des rêves» art déco où toutes les illusions sont permises pour abuser de la crédulité des gens. Un cirque tout aussi révélateur que celui à la fin de son film précédent, Miss Peregrine et les enfants particuliers (2016).

Dans l’imaginaire de Burton, ce lieu incarne le capitalisme sauvage où sont exploités les marginaux par des gens qui misent sur leur individualisme forcené pour se hisser au sommet. Il est tout de même fascinant de voir cette critique subtile au sein d’un film Disney…



C’est aussi là qu’on peut le plus reconnaître sa signature caractéristique, dans un long métrage beaucoup plus sage sur le plan esthétique et de la mise en scène que ses œuvres précédentes (on est loin de la démesure d’Alice au pays des merveilles, en 2010, produit pour la même compagnie). En vieux routier, Burton utilise, par exemple, quantité de plans de réaction des spectateurs pour illustrer l’émerveillement suscité par les vols planés de l’éléphanteau magique.

Car cette comédie fantaisiste vise, tout de même, les familles et ceux qui ont conservé leur cœur d’enfant. Dumbo symbolise la différence dans le regard de ceux qui sont «normaux», mais aussi comment celle-ci peut être utilisée de façon créative.

Burton trace aussi un parallèle entre la volonté de l’éléphanteau d’être réuni avec sa mère et celle des enfants à reprendre une vie familiale «normale» avec leur père psychologiquement fragile.

Dumbo peut compter sur une distribution cinq étoiles. À commencer par Colin Farrell, qu’on a déjà vu beaucoup plus convaincant, dans les films de Yorgos Lanthimos, notamment. Mais DeVito et Keaton, qui ont déjà joué devant la caméra de Burton, sont parfaitement à l’aise dans des rôles plus typés (bien que le personnage DeVito offre, vers la fin, plus de nuances).

V.A. Vandevere (Michael Keaton), un entrepreneur ambitieux, convainc Max Medici (Danny DeVito) qu'ils peuvent faire une vedette lucrative de l'éléphanteau volant.

Reste que c’est Eva Green, la Miss Peregrine du film du même nom, qui scintille dans cette histoire. Sa forte présence et son élégance naturelle captivent le regard. De même que sa facilité à interagir avec les enfants.

Dumbo offre du rire, de l’intelligence et de la magie. C’est déjà beaucoup plus que la majorité des divertissements même s’il manque d’émotion.



Dumbo effectue son premier vol dans le chapiteau...

Au générique

Titre : Dumbo

Cote : ***

Genre : Comédie fantaisiste

Réalisateur : Tim Burton

Acteurs : Colin Farrell, Danny DeVito, Michael Keaton, Eva Green

Classement : Général

Durée : 1h52



On aime : le doigté. La proposition esthétique. L’imaginaire de Burton.

On n’aime pas : le manque d’émotion. Des longueurs.