Legault: «il n'y a pas d'islamophobie», donc pas de journée contre l'islamophobie

En conférence de presse à la fin d'une réunion de deux jours de ses députés à Gatineau, M. Legault a d'abord vanté l'approche prudente de sa vice-première-ministre, mais n'a pas mis de temps à clore le débat.

GATINEAU — Il n'y a pas d'islamophobie au Québec, a assuré jeudi le premier ministre François Legault, qui ferme la porte ouverte par sa vice-première ministre Geneviève Guilbault en faveur d'une journée nationale contre l'islamophobie.


Mme Guilbault avait manifesté en début de semaine son ouverture dans la foulée de la commémoration de la tuerie de la mosquée de Québec, survenue précisément il y a deux ans.

En conférence de presse à la fin d'une réunion de deux jours de ses députés à Gatineau, M. Legault a d'abord vanté l'approche prudente de sa vice-première-ministre, mais n'a pas mis de temps à clore le débat.

«Geneviève (Guilbault) a été prudente en disant qu'on allait regarder ça, on l'a regardé et il n'y en aura pas, c'est clair, là», a dit le premier ministre.

Quant aux motifs qui justifient ce refus, il a été encore une fois laconique. «Bon, écoutez, je ne pense pas qu'il y a de l'islamophobie au Québec», a-t-il tranché.

Après la conférence de presse, un attaché de presse du gouvernement, Ewan Sauves, s'est rendu à la hâte dans la salle des médias pour préciser que «le premier ministre voulait dire: il n'y a pas de courant d'islamophobie au Québec».

Cela demeure un enjeu délicat au Québec depuis les tout débuts du débat sur les accommodements raisonnables en 2007, suivi des diverses tentatives des gouvernements successifs, du Parti libéral, du Parti québécois et désormais de la CAQ, de légiférer sur la question de la laïcité et du port des signes religieux.

L'interdiction éventuelle du port des signes religieux par les représentants de l'État en position d'autorité, que prône la CAQ, se trouverait à toucher par exemple des musulmanes qui souhaitent porter le voile ou le foulard.

À Ottawa, le comité parlementaire du Patrimoine avait recommandé il y a près d'un an au gouvernement fédéral de décréter le 29 janvier «Journée nationale de commémoration et d'activités concernant l'islamophobie et toute autre forme de discrimination religieuse».

L'idée avait été avancée par le Conseil national des musulmans canadiens qui avait écrit au premier ministre et avait été soumise au comité après l'adoption en Chambre de la motion M-103.

Les élus conservateurs, minoritaires au comité, avaient signé un rapport dissident où ils soulevaient certains problèmes tels que la définition du terme islamophobie et l'allégation non fondée, selon eux, qu'un climat de haine et de peur était en train de s'installer dans la population.

Il y a deux ans jour pour jour, six personnes avaient été tuées et 19 autres avaient été blessées lorsqu'Alexandre Bissonnette avait fait irruption dans leur lieu de culte le 29 janvier 2017. Bissonnette est en attente de sa peine. Il a plaidé coupable à six chefs d'accusation de meurtre prémédité et six autres de tentative de meurtre avec une arme à feu à autorisation restreinte.

Rappelons que de son côté, le maire de Toronto, John Tory, a désigné le 29 janvier jour de mémoire et d'action contre l'islamophobie dans sa ville.