La production de granules doublera

La capacité de production de granules augmentera de 250 % pour atteindre 1 115 000 tonnes, au cours des prochaines années, avec l’arrivée de nouveaux producteurs comme Barrette-Chapais sur le marché. Faute de marchés au Québec, ces granules prendront le chemin de l’exportation.


Au Québec, les 10 producteurs de granules de bois ont produit 286 000 tonnes de granules, l’an dernier, alors que la capacité de production est de 460 000 tonnes.

André Bédard, directeur des ventes de Granules LG.

« On utilise juste 62 % de la capacité », a noté John Arsenault, directeur du groupe granules de bois du Bureau de promotion des produits du bois du Québec (QWEB), lors de la Conférence sur le chauffage à la biomasse forestière résiduelle présenté à Québec jeudi dernier. « On a un surplus de capacité, dit-il. Tous les producteurs doivent être des exportateurs et tous les nouveaux projets doivent aussi viser les marchés d’exportation. »



Par exemple, Barrette-Chapais à Chapais doit annoncer mardi un projet de production de 200 000 tonnes de granules, laquelle sera vouée à l’exportation à partir du port de Grande-Anse. À Saint-Michel-des-Saints, un autre projet qui entrera en production en 2019 ajoutera 180 000 tonnes de production.

Pendant ce temps au Québec, le marché de consommation de granules est de 100 000 à 150 000 tonnes par année, soit environ la capacité de production de Granules LG, le plus important producteur de granules au Québec.

« On aimerait ça vendre toute notre production au Québec, mais le marché n’est pas là », a pour sa part soutenu André Bédard, directeur des ventes de l’entreprise basée à Saint-Félicien. La raison : il n’y a que 65 000 poêles aux granules sur les trois millions de maisons au Québec.

Après 30 ans de développement, la granule est encore une commodité de niche, ajoute ce dernier. Pourtant, le prix de la granule a déjà été optimisé pour réduire le nombre d’intermédiaires au minimum, car Granules LG livre directement aux détaillants qui vendent aux utilisateurs. « L’épuration est finie », lance l’homme qui aimerait mieux comprendre les besoins des utilisateurs pour augmenter le volume de vente.



Pour augmenter la consommation de 500 000 tonnes de granules, il a lancé un défi à l’industrie : dénicher 50 projets agricoles, 50 projets d’érablières, 50 projets de serres, 500 projets dans les écoles, 50 000 clients résidentiels, cinq clients industriels (comme des mines ou des villages nordiques isolés) et 55 projets de réseaux de chaleur comme on retrouve à la cité Verte à Québec.

Un défi colossal, mais souhaitable d’un point de vue de lutte aux changements climatiques, car Québec souhaite augmenter la production de bioénergie de 50 % selon la politique énergétique 2030.

Pour écouler ses produits, Granules LG exporte donc 40 000 tonnes de granules en Italie et près de 25 000 tonnes aux États-Unis.

L’Europe est particulièrement friande des granules canadiennes, car en plus d’être de bonne qualité, c’est un produit qui permet aux pays européens de réduire leur empreinte climatique en misant sur une source d’énergie renouvelable, notamment pour remplacer les centrales au charbon, souligne John Arsenault. Le chauffage résidentiel aux granules est aussi en croissance alors que plus de 200 000 unités de chauffage sont vendues par année, alors qu’à peine 10 000 unités sont vendues au Canada par an. Au-delà des marchés européens, le Japon et la Corée du Sud consomment aussi de plus de plus de granules pour remplacer l’utilisation du charbon.

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UNE LUTTE À FINIR CONTRE LE GAZ NATUREL

La conversion au gaz naturel n’est pas une bonne solution pour lutter contre les changements climatiques dans un contexte de surplus d’énergie renouvelable, estime Normand Mousseau, professeur au département de physique et directeur académique de l’Institut de l’énergie Trottier à Polytechnique Montréal. 

« Il ne faut pas considérer le gaz naturel comme une énergie d’avenir », s’est insurgé Normand Mousseau, lors de la Conférence sur le chauffage à la biomasse forestière résiduelle présentés jeudi à Québec. Même si on réalise une économie de gaz à effet de serre de 30 % en remplaçant un système au mazout par du gaz naturel, après ça on frappe un mur, parce qu’on ne peut pas réduire plus. C’est une solution qui ne nous amène nulle part, parce qu’on a des objectifs de réduction de 80 % des GES en 2050. »

Selon ce dernier, il faudrait plutôt comparer toutes les alternatives d’énergies renouvelables entre elles lorsque vient le temps de faire une conversion énergétique, plutôt que de se comparer au gaz naturel, d’origine fossile. D’autant plus que le Québec, comme toutes les autres provinces canadiennes, ratera ses objectifs de réduction des GES de 2030, selon une étude publiée récemment, ajoute-t-il. 

Au cours des derniers mois, Hydro-Québec a dû déverser de l’eau dans certains de ses barrages et on retrouve un énorme potentiel de récolte de biomasse inexploité. « Dans ce contexte-là, on est dans un surplus d’énergie renouvelable. Il faut développer des marchés et déplacer les hydrocarbures fossiles », a remarqué Normand Mousseau, qui estime que la biomasse forestière est un outil fantastique pour lutter contre les changements climatiques. 

Lueur d’espoir : gaz naturel renouvelable

Depuis la construction de l’usine de biométhanisation à Saint-Hyacinthe, qui transforme les déchets organiques en gaz naturel renouvelable (GNR), Énergir développe de nouveaux marchés pour vendre cette source d’énergie écologique. L’Université Laval a d’ailleurs décidé de convertir 8 % de sa consommation, ce qui représente un million de mètres cubes de GNR, évitant ainsi l’émission de 1888 tonnes de GES. 

Dans le cadre de cette entente, Énergir investit aussi dans la recherche et le développement pour développer la filière du gaz naturel renouvelable fait avec de la biomasse forestière résiduelle. Après avoir fait des tests en laboratoire, le distributeur d’énergie tente de mettre son procédé à l’échelle pour augmenter la production. À l’Université Laval, la chercheuse Évelyne Thiffault travaillera quant à elle sur des projets pour mieux comprendre comment la récolte de la biomasse peut avantager la sylviculture et l’aménagement forestier, tout en peaufinant les techniques pour caractériser la qualité de la biomasse dans le but d’optimiser sa valeur.