Chronique|

Enfin, une place pour le numérique

Cela fait trop longtemps que le gouvernement provincial ne parvient pas à prendre ses responsabilités, par manque d’intérêt ou de compétence dans le domaine du numérique. La venue de nouveaux candidats qui comprennent les implications de ces technologies pourra peut-être faire changer les choses, écrit notre éditorialiste.

ÉDITORIAL / Pour une première fois, pendant des élections provinciales, les partis politiques montrent la volonté de s’attaquer à l’emprise grandissante du numérique sur nos vies.


Le Parti québécois (PQ) présente une plateforme élaborée qui se distingue avec la promesse de nommer, enfin, un ministre responsable du numérique, de créer un Conseil national du numérique et d’adopter une politique du développement du logiciel libre. Le PQ fait aussi miroiter un gouvernement «sans papier», comme l’a fait le gouvernement de l’Estonie. Ça peut sembler utopique, mais la mise en œuvre de ces chantiers, si elle est bien faite, est une occasion de développer des expertises et des outils dont le secteur privé et la société tout entière peut bénéficier. 

Ce n’est pas un hasard si les programmes des partis sont plus étoffés qu’ils l’étaient jusqu’ici. L’arrivée de Marwah Rizqy comme candidate au sein de l’équipe libérale est certainement pour quelque chose dans le changement d’orientation du PLQ, qui se dit maintenant prêt à obliger tous les fournisseurs étrangers, incluant le géant Amazon, à percevoir la TVQ pour la fourniture de biens tangibles. 

L’entrée sur la scène politique de Michelle Blanc, pour le Parti québécois, explique aussi l’étendue de la plateforme péquiste, la plus complète de tous les partis. Le parti qui formera le prochain gouvernement, si ce n’est pas le PQ, devrait s’en inspirer.

À la Coalition avenir Québec, Mario Asselin sera peut-être en mesure de convaincre son chef d’emboîter le pas. La CAQ s’est jusqu’ici montrée moins intéressée par ce dossier que les autres partis. 

Pour que le prochain gouvernement accorde à ce dossier l’importance qu’il mérite, il faut que les décisions et les politiques soient prises au sein du Conseil exécutif. Tous les ministères et organismes de l’État sont tributaires, à un degré ou un autre, des technologies de l’information. Les directives d’un éventuel ministre, ou un hypothétique secrétariat du numérique devraient dicter la conduite pour l’ensemble de la machine, et des sous-ministres. 

M. Legault aura-t-il cette préoccupation s’il occupe le poste au lendemain des élections? Il est permis d’en douter. Espérons que son entourage parviendra à lui faire réaliser le potentiel immense de ce dossier.

Cela fait trop longtemps que le gouvernement provincial ne parvient pas à prendre ses responsabilités, par manque d’intérêt ou de compétence en ce domaine. La venue de nouveaux candidats qui comprennent les implications de ces technologies pourra peut-être faire changer les choses.

Une bataille importante se prépare, en Europe et aux États-Unis, pour contrer l’emprise grandissante des géants du Web sur nos données personnelles. Une poursuite vient d’être déposée par les créateurs du fureteur Brave contre Google, pour non-respect du nouveau Réglement général sur la protection des données (RGPD). 

Aux États-Unis, des voix commencent à s’élever en faveur d’un démantèlement de Google et Facebook pour instaurer un équilibre inexistant dans le marché. Hier encore, un analyste de CITI estimait qu’Amazon aurait intérêt à séparer ses activités dans le service web (AWS) de celles dans la vente au détail, afin d’éviter que Washington mette à exécution une menace de réglementer ses activités.

Tôt ou tard, cette bataille se déroulera chez nous. Mieux vaut s’y préparer.