La chaîne de blocs ou blockchain. Cette technologie qui pourrait un jour révolutionner plusieurs industries dans les secteurs bancaires, des services et des assurances.
Ce n’est pas sans raison que des institutions financières injectent des millions de dollars afin de développer et de maîtriser ses secrets.
«Imaginez un monde avec des transactions sans courtier, sans l’intervention des municipalités et des institutions financières», décrit Chadi Habib, premier vice-président Technologies de l’information au Mouvement Desjardins.
Mais attention, nous ne sommes pas encore là. Seulement entre 5 % et 10 % du potentiel d’utilisation du blockchain est actuellement exploité. Il y a encore plusieurs choses qui ne sont pas digitalisés, avance Francis Nadeau, directeur général chez HydraLab, une jeune boîte de Québec qui se spécialise dans le domaine.
Mais avant d’aller plus loin. La question. C’est quoi la blockchain?
Pour plusieurs, il s’agit de la technologie qui permet le fonctionnement des cryptomonnaies, des devises électroniques échangeables comme le Bitcoin. C’est vrai.
«La première implantation du blockchain était pour créer une devise virtuelle qui pouvait passer d’une personne à l’autre sans l’intervention de tierces parties de confiance [comme une banque]», explique M. Habib, concédant qu’il s’agit d’un système «sécuritaire».
Mais plus précisément, la blockchain est une technologie de stockage et de transmission d’informations. Il s’agit de blocs de données mis bout à bout qui contiennent l’historique de toutes les transactions effectuées entre les utilisateurs et leurs signatures numériques. Si une modification est apportée à la chaîne, les utilisateurs sont informés.
Dans le cas des cryptomonnaies, chaque bloc enregistre un certain nombre de transactions. Et chaque transaction est validée par le système.
Pour l’heure, la technologie du blockchain est principalement utilisée dans le domaine financier. Son potentiel de développement est toutefois «énorme», estiment des experts. Elle pourrait éventuellement servir à réaliser d’autres transactions d’actifs.
Par exemple, une banque pourrait utiliser cette technologie pour transférer de l’argent à un membre en voyage, ce qui diminuerait les frais. Des consommateurs pourraient aussi utiliser une chaîne de blocs pour vendre leur maison ou leur voiture.
«Si on veut réaliser la transaction d’une maison par une chaîne de blocs, il va falloir d’abord que les municipalités enregistrent les maisons de façon numérique. Toutes les institutions financières devront accepter de mettre les hypothèques au nom des différentes personnes aussi dans la blockchain. Après, le rôle des notaires devra évoluer en conséquence. Il y a aussi la question des agents immobiliers», a indiqué au Soleil M. Habib, dans le cadre d’un événement organisé par Le Cercle finance du Québec.
Le spécialiste chez Desjardins avance que la blockchain «va reformuler des modèles économiques».
Imaginez un monde avec des transactions sans courtier, sans l’intervention des municipalités et des institutions financières
Autres utilités
D’ici quelques années, les chaînes de bloc pourraient aussi servir pour la traçabilité des aliments. Par exemple, avec un code numérique on pourrait connaître la provenance du saumon à l’épicerie.
Cette technologie pourrait également être utilisée lors de scrutin pour enrayer la fraude électorale. Chaque droit de vote serait associé à une signature numérique dans la base de données. Ce qui diminuerait la paperasse et empêcherait la personne de voter à plusieurs reprises.
À titre d’exemple, le détaillant Chow Tai Fook Jewellery a récemment annoncé qu’il utilisait une chaîne de blocs pour l’authentification de ses diamants par la traçabilité. L’objectif de cette formule est d’assurer aux consommateurs qu’ils n’achètent pas de «diamants de sang».
Du côté alimentaire, le détaillant Walmart s’est associé à IBM pour développer une chaîne de blocs permettant de voir le cheminement des mangues aux États-Unis et celui des porcs en Chine.
Comme autres avantages de cette technologie, M. Nadeau, patron chez HydraLab, évoque la rapidité des transactions. Il stipule que la blockchain fonctionne avec «un réseau distribué au lieu de silos de données».
Le hic!
Le hic avec la blockchain, c’est que personne n’est forcé de partager sa vraie identité, déplorent les experts. Et une personne peut créer plus d’un avatar. Il existe des chaînes de blocs publiques, ouvertes à tous, et des privées. Ce qui peut donner des maux de tête aux autorités réglementaires.
«C’est un peu comme un changement au niveau de la plomberie des marchés financiers», illustre Lise Estelle Brault, directrice principale de l’encadrement des dérivés à l’Autorité des marchés financiers.
Son organisation a d’ailleurs mis sur pied au cours des derniers mois un laboratoire technique pour tester de nouveaux produits.
«Nous avons essayé de bâtir une bourse avec la blockchain. Si une personne voulait créer une bourse sur Ethereum, on veut voir si cela pourrait fonctionner», dit-elle.
Cette dernière invite les citoyens à être prudents lorsqu’ils investissent dans les devises cryptographiques.
Les experts rappellent que n’importe qui avec des connaissances informatiques peut créer une chaîne de blocs à partir d’un ordinateur et posséder sa cryptomonnaie.
Satoshi Nakamoto est le pseudonyme du fondateur inconnu du bitcoin et de la première chaîne de blocs. Il détient environ 970 000 bitcoins. La valeur d’un bitcoin est aujourd’hui d’environ 8400 $.