Au passage du Soleil ce mercredi pluvieux, quatre ouvriers-artistes avaient assemblé la structure métallique des deux cubes posés l’un sur l’autre. Ils avaient même entrepris l’installation des grandes plaques blanches carrées caractéristiques de la production de l’auteur et idéateur français Jean-Pierre Raynaud.
Ludovic Boney, de Québec, supervise le chantier de la renaissance au cœur de la colline Parlementaire. Un lieu qui sied mieux à la sculpture que le port, juge-t-il. «Elle n’avait pas été implantée à sa juste valeur. Il n’y avait pas tout l’aménagement prévu [ici] autour.»
M. Boney pense que les amants des arts pourront mieux la «lire», l’apprécier, dans sa nouvelle demeure. Enveloppée de verdure, elle peut notamment être mise en relief avec les immeubles du coin, dont le Concorde, observe-t-il.
Abattue en 2015 par la Ville de Québec, la structure originelle trônait au cœur de la Place de Paris. Le cadeau offert par la Ville Lumière avait été inauguré en 1987 sur la rive fluviale. «[Un] hommage aux premiers Français qui débarquèrent en ce lieu autrefois bord de mer pour y bâtir un pays où leur culture n’a cessé de s’affirmer», lisait-on sur la plaque explicative.
Mais ses dénigreurs ont eu gain de cause quand la mairie de la capitale l’a prestement réduite en poussière à coup de pelleteuse, invoquant la détérioration.
Des collectionneurs et artistes de Québec avaient décrié la manœuvre, dont l’avocat Marc Bellemare. Celui-ci a alors entrepris de convaincre l’artiste de lui céder les droits sur l’ouvrage pour qu’il puisse financer sa reconstruction.
Le juriste s’enchante de la résurrection. «C’est pour moi un grand bonheur parce que j’ai toujours respecté l’artiste qu’est Jean-Pierre Raynaud. J’ai toujours déploré que son œuvre soit détruite.»
Invité par son ancien professeur Jean-Pierre Morin à participer à l’aventure, le sculpteur Ludovic Boney est impliqué depuis la visite de Jean-Pierre Raynaud au Québec en septembre 2017, quand les nouveaux plans ont été réalisés. C’est toutefois en mai, lorsque la Commission de la capitale nationale (CCNQ) a accepté de recevoir la pièce sur ses terres, que les travaux se sont accélérés.
Durant les trois mois, l’essentiel du boulot a été réalisé en atelier, ce qui permet l’érection rapide, en une semaine, de l’ensemble.
Singulier à plusieurs égards
Autoportrait est singulier à plusieurs égards, évalue Ludovic Boney. «Il est particulier parce qu’il est très médiatisé! Aussi, d’habitude je fais toujours des courbes, c’est le plus droit que j’ai fait. C’est rare que les artistes travaillent les lignes droites droites droites. Et l’auteur est un artiste international.»
D’ailleurs, la CCNQ rappelle que «c’est une œuvre très connue dans le monde», dixit la technicienne en communications Lysanne Marois-Ouellet. «On retrouve des répliques un peu partout dans le monde.»
La Ville de Québec a octroyé 50 000 $ pour l’installation. La CCNQ fournit le site.
L’essentiel du projet, entre 200 000 $ et 300 000 $, est cependant payé par Me Marc Bellemare qui demeure propriétaire de l’œuvre. Il a signé un contrat pour qu’elle soit exposée durant 25 ans dans le parc de la haute ville.
Les matériaux, l’aluminium et les panneaux composites, ont été choisis pour résister aux hivers québécois et être nettoyables facilement.
L’inauguration officielle aura lieu durant l’automne, après les élections.