En prévision du sommet, le maire de Québec, Régis Labeaume, avait autorisé un achat spécial d’urgence de caméras de sécurité pour le Service de police de la Ville de Québec (SPVQ). Il y en avait pour 141 000 $.
Ces caméras ont fonctionné à Québec pendant le sommet. Mais elles n’ont jamais cessé d’enregistrer, a appris Le Soleil. «Oui, elles sont toujours en fonction», confirme David Poitras, porte-parole du SPVQ.
Le SPVQ est «toujours en réflexion pour savoir si on garde tous ces ajouts-là pour les futurs événements. Et ce n’est pas juste pour des manifestations», ajoute M. Poitras.
«Ça peut être utile dans le cadre de grands événements et dans le cadre de certaines enquêtes», précise-t-il, citant en exemple le Festival d’été, le Carnaval ou le Grand prix cycliste.
Impossible, toutefois, d’obtenir d’autres précisions au sujet de ces appareils de surveillance. «Pour des raisons stratégiques, on ne dévoile ni l’emplacement, ni le nombre, ni le type de caméras», indique David Poitras.
Lors du G7, les caméras avaient été installées dans des secteurs jugés plus «propices» en matière de sécurité, précise M. Poitras. Elles n’ont pas bougé depuis.
Rappelons que le Centre des congrès, le Parlement, le Château Frontenac, la Grande-Allée, l’avenue Cartier et une partie du boulevard René-Lévesque et du chemin Sainte-Foy avaient fait l’objet d’une surveillance policière plus étroite durant les manifestations anti-G7.
«Déplorable»
La Coalition pour le droit de manifester à Québec dénonce le maintien des caméras de surveillance du G7.
«Ce genre de manœuvre là, où on se sert d’événements pour installer et mettre en fonction de la surveillance de cette ampleur-là dans une ville, sans consulter d’aucune façon la population, nous, on trouve ça complètement déplorable», dit le port-parole de la Coalition, Vania Wright-Larin.
«Les gens devraient pouvoir savoir où sont ces caméras, qu’est-ce qu’elles filment, combien, comment. Il n’y a pas d’information qui est donnée, c’est fait en catimini», ajoute-t-il.
Geneviève Lajeunesse, directrice de Crypto-Québec, un média sans but lucratif qui se spécialise notamment dans les enjeux de sécurité information, des technologies de l’information et du renseignement, estime que la poursuite des enregistrements des caméras du G7 soulève des questions sur leur utilité pour le maintien de l’ordre.
Elle souligne que les caméras peuvent avoir un «effet dissuasif» chez ceux qui seraient tentés de commettre un acte criminel. Les images captées peuvent aussi servir de preuve en justice, note Mme Lajeunesse.
Toutefois, les caméras peuvent bafouer le droit à la vie privée de plusieurs manières, ajoute-t-elle. Les données récoltées ne sont pas imperméables aux fuites ou au piratage. «Ça beau être pensé pour un usage sécuritaire, la sécurité du matériel n’est pas toujours assurée».
De plus, les caméras peuvent donner le sentiment aux citoyens qu’ils sont constamment surveillés. «On ne sait jamais si l’œil nous regarde», illustre-t-elle.
Geneviève Lajeunesse estime aussi que les caméras de surveillance peuvent décourager les manifestations de s’exprimer. Elle ne voudrait pas que des rues et des parcs de Québec s’apparentent à la zone de «libre expression» réservée aux manifestants contre le G7 à La Malbaie.
«C’est un endroit clôturé avec des caméras qui les regardent, dit Mme Lajeunesse. On ne veut pas que nos lieux publics deviennent comme ça.»