Heureusement, le projet de loi sur le cannabis fait l’objet d’une couverture médiatique étendue et représente l’un des enjeux sociétaux qui suscitent le plus d’intérêt public. Par contre, plutôt qu’être appuyée sur les faits et l’information scientifique, la rhétorique des opposants et des partisans provoque de vives réactions émotives de part et d’autre. Afin de contribuer sobrement à ce débat, j’ai participé le 20 avril dernier à un panel de discussion à l’Université Laval, conjointement avec deux autres sénatrices indépendantes du Québec — l’honorable Renée Dupuis et l’honorable Raymonde Saint-Germain.
Le panel était complété par des représentants de Santé Canada, du ministère de la Santé et des Services sociaux ainsi que de l’Institut national de santé publique du Québec. Tous ont présenté une approche nuancée et rationnelle de la légalisation, laquelle fait trop souvent défaut.
Également présent, le président de l’association des étudiants et étudiantes de premier cycle (CADEUL) a dressé un constat préoccupant: la consommation de cannabis représente une pratique courante sur le campus et ailleurs au Québec. En général, les usagers ne perçoivent pas de risque significatif pour eux-mêmes. Pourtant, les études scientifiques démontrent clairement les effets néfastes de cette substance sur la santé humaine, en particulier lorsqu’elle est fumée. Le manque de sensibilisation de la population serait-il attribuable à la prohibition qui prévaut au Canada depuis 1923?
Les experts s’entendent pour dire que la criminalisation du cannabis n’engendre pas d’effet dissuasif. En prévision de l’entrée en vigueur de la légalisation, les différents paliers de gouvernement doivent mettre sur pied une campagne d’éducation et de sensibilisation majeure, sans quoi la réforme envisagée n’engendrera pas les résultats escomptés.
La sénatrice Saint-Germain et moi appuyons les principaux objectifs du projet de loi C-45 : écarter le crime organisé du lucratif marché du cannabis, tout en protégeant les jeunes et en créant un cadre juridique qui permettra aux personnes majeures de se procurer un produit contrôlé par une vente au détail encadrée et provenant d’une industrie bien réglementée. Il ne fait plus de doute que l’échec de la criminalisation a été démontré. Dans ce contexte, seule une stratégie globale basée sur la science et les faits nous permettra d’atteindre ces objectifs.
Le projet de loi fédéral est actuellement devant cinq comités permanents du Sénat. Pour produire une étude détaillée et exhaustive de la proposition du gouvernement, les sénateurs se doivent de laisser de côté leurs préjugés, peu importe qu’ils tendent à banaliser ou à diaboliser le cannabis.
D’ici le mois de juin, les sénateurs continueront leur second examen attentif, en ayant comme objectif de prendre des décisions éclairées dans l’intérêt des Canadiennes et des Canadiens. Gardons en tête cet enseignement important: la banalisation de la consommation de cannabis doit cesser, et la seule manière d’y parvenir passe par l’éducation et la sensibilisation du public.
L’honorable Rosa Galvez, sénatrice indépendante du Québec