Décès de la petite Rosalie: «Pu capable de l’entendre... fais de quoi»

Audrey Gagnon a fait face jeudi à deux accusations, soit d'avoir entravé le travail d'un policier et d'avoir endommagé un bien avec le feu au poste de police du parc Victoria.

Christian Rouleau vidait l’appartement de sa défunte mère, mardi après-midi, dans un immeuble à logements de l’avenue Gaspard, à Charlesbourg, lorsqu’il a entendu un enfant pleurer et un homme lui crier après dans le logement voisin.


«Il lui disait "ferme ta yeule, tabarnak, j’t’écoeuré" et il donnait des coups de poing dans le mur», raconte M. Rouleau. 

En sortant de l’appartement de sa mère, Christian Rouleau a aperçu Audrey Gagnon, 23 ans, la mère de Rosalie, 2 ans, dont le corps a été retrouvé mercredi dans le bac à ordure d’une maison de Charlesbourg. 

M. Rouleau dit avoir vu Audrey Gagnon fumer une cigarette à l’extérieur de l’immeuble à logements et monter ensuite dans l’escalier à l’intérieur. Selon lui, elle portait un manteau et tenait ce qui semblait un sac de plastique de dépanneur. 

La fillette pleurait et appelait sa maman, mais l’homme ne décolérait pas, se souvient M. Rouleau. «Quand la mère est arrivée, il lui a dit "pu capable de l’entendre, crisse. Fais de quoi"».

Christian Rouleau, qui a livré sa déposition aux policiers, affirme que les cris ont duré une dizaine de minutes. Ils ont ensuite cessé.

Que s’est-il passé ensuite avec Rosalie Gagnon, avant qu’elle perde la vie? Plusieurs zones d’ombres subsistent dans la chronologie des évènements. 

Mais selon les informations obtenues par Le Soleil, Audrey Gagnon aurait été filmée par des caméras de surveillance dans la nuit de mardi à mercredi au parc-terrasse Bon-Air, à Charlesbourg. Ce parc est situé à environ 10 minutes à pied du logement où Christian Rouleau dit avoir aperçu la mère, et où celle-ci a été interpellée par les policiers. 

On ignore ensuite où se serait dirigée Audrey Gagnon. Mais la poussette est restée au Parc Bon-Air et, mercredi matin, vers 7h15, une intervenante de l’école du Rucher, située juste à côté du parc, l’a aperçue. La poussette était vide et aurait été ensanglantée. 

L’intervenante de l’école aurait alors alerté les policiers. Ceux-ci ont aussitôt entamé des recherches pour retrouver le propriétaire de la poussette. 

Audrey Gagnon avec sa fille Rosalie

Vers 12h30, Audrey Gagnon aurait été vue sur l’avenue Cartier, en haute ville, sans son enfant. Elle se serait rendue dans une pharmacie du secteur pour se procurer de la méthadone, un narcotique que les toxicomanes consomment pour se sevrer d’opiacés plus puissants. 

Deux heures plus tard, à la demande de la famille, le SPVQ a demandé l’aide de la population et des médias pour retrouver la mère et sa fille, qui étaient toujours portées disparues. 

Audrey Gagnon a finalement été localisée vers 15h, dans l’appartement de l’avenue Gaspard où elle se serait trouvée la veille. Elle aurait été fortement intoxiquée. Sa fille n’était pas avec elle. 

Un homme dans la vingtaine, qui habite le logement, a aussi été interrogé à titre de témoin. Il a été relâché plus tard dans la journée. 

Après son interrogatoire, Audrey Gagnon semble avoir guidé elle-même les policiers vers une maison de l’avenue de Gaulle, où le corps de sa fille a été découvert. Deux témoins ont affirmé au Soleil avoir aperçu la mère avec des enquêteurs. 

Les policiers ont ensuite fouillé les bacs à ordure et les bacs à recyclage sur le côté et à l’arrière de la maison. C’est dans l’un de ceux-ci qu’ils ont trouvé le corps inanimé de la petite Rosalie, qui a été recouvert d’une bâche. Le décès de la fillette a été constaté à l’hôpital. 

Selon des informations obtenues par Le Soleil, l’enfant aurait reçu une dizaine de coups de couteau. 

Audrey Gagnon a fait face jeudi à deux accusations, soit d'avoir entravé le travail d'un policier et d'avoir endommagé un bien avec le feu au poste de police du parc Victoria.

Arrestation et comparution

Jeudi matin, le SPVQ a annoncé l’arrestation d’Audrey Gagnon pour meurtre. Sa comparution devait avoir lieu en matinée. Mais lors de la détention au poste de police du parc Victoria, la mère aurait mis le feu à son matelas et se serait infligé des blessures mineures. 

Elle a été conduite au palais de justice de Québec en après-midi. Lors d’une brève comparution, elle n’a cependant pas été accusée de meurtre, mais de deux autres infractions criminelles, soit d’avoir entravé le travail d’un policier et d’avoir endommagé un bien avec le feu au poste de police. 

La cause d’Audrey Gagnon a été reportée à mercredi prochain, le temps que son dossier soit complété. D’autres accusations pourraient donc être portées contre elle. La couronne s’est opposée à sa remise en liberté.

Durant la journée, mercredi, l’enquête de la police de Québec s’est poursuivie. Sur l’avenue Gaspard, notamment, le service d’identité judiciaire a tenté de recueillir des preuves. Un large périmètre de sécurité a été érigé. 

Deux jours après avoir entendu des pleurs d’enfant et des cris d’adulte dans l’appartement voisin, Christian Rouleau s’en veut de ne pas avoir appelé la police. 

«J’ai failli le faire, mais je ne voulais pas me mêler de leurs affaires, dit M. Rouleau. Aujourd’hui, je le regrette».