L’odyssée sensible du chorégraphe Alan Lake

Le chorégraphe Alan Lake s’est plongé pour la première fois dans une «grande forme», avec neuf interprètes sur scène.

S’inspirant du tableau «Le radeau de la Méduse» pour mettre en scène une humanité à la dérive, des amoncellements de corps, un plancher liquide, Alan Lake a créé Le cri des méduses, une création pluridisciplinaire dont le mouvement chorégraphique demeure la figure de proue.


Le chorégraphe, cinéaste et artiste visuel de Québec, qui a présenté ces dernières années Ravages et Les caveaux, s’est plongé pour la première fois dans une «grande forme», avec neuf interprètes sur scène. Aussi pour la première fois, son travail sera présenté dans la saison de danse du Grand théâtre (en coprésentation avec la Rotonde, qui a programmé ses spectacles précédents) et vient de remplir six fois La Cinquième salle de la Place des Arts.

Avec davantage de corps, les possibilités de mouvement se décuplent, et Lake s’est appliqué à faire naître une chorégraphie où les variations sculpturales s’annoncent nombreuses.



La gestuelle qu’il a développée avec sa compagnie, Alan Lake Factori(e), est faite de «beaucoup de touchés, c’est énergique, très acrobatique, c’est une œuvre de partenaires et de survie», indique-t-il. Cherchant mille manières de faire monter les corps les uns sur les autres en amoncellements pyramidaux (comme dans le fameux tableau), il a, fidèle à son habitude, cherché à cultiver l’ambiguïté. «On peut se demander s’il s’agit d’une quête pour créer un assemblage humain extraordinaire ou si les gestes cherchent à sceller une blessure, à arrêter l’hémorragie», expose le chorégraphe.

D’entrée de jeu, il qualifie Le cri des méduses d’odyssée, et ne nie pas que ses danseurs ressemblent parfois à une hydre de Lerne. «Il y a toute une mythologie, d’une œuvre à l’autre, qui se construit, constate-t-il. Ça devient fantastique, onirique, ça bascule dans l’horrible pour aller dans le magnifique.» Les antagonismes, chez Alan Lake, traversent les spectacles comme des fils d’Ariane.

Cherchant mille manières de faire monter les corps les uns sur les autres en amoncellements pyramidaux (comme dans le tableau de Géricault «Le radeau de la Méduse»), Alan Lake a cherché à cultiver l’ambiguïté.

Images filmées
Comme pour Ravages, la création du Cri des méduses s’est amorcée avec un tournage, mais cette fois, les images filmées ne seront pas intégrées au spectacle. «L’œuvre était déjà excessivement chargée, par les neuf danseurs, la scénographie, les accessoires. Un 10e protagoniste vidéo, c’était beaucoup trop», a constaté Alan Lake. «On a utilisé le tournage différemment, en transposant la construction narrative, avec un prologue et un épilogue, certaines matières [dont une substance noire et visqueuse qui devient un personnage], et une structure en tableaux vivants, presque de l’ordre du montage.»

Si le tableau de Géricault, qui présentait un héros métis, anonyme et de dos, possède plusieurs tangentes sociales, raciales, et sociopolitiques, la chorégraphie qu’il a inspirée se veut plus métaphorique, voire symboliste.



«Je ne me veux pas activiste dans mon œuvre, mais c’est important pour moi que l’art passe par le social, explique Alan Lake. On est dans une situation relativement critique. […] Il y a des états écologiques et climatiques alarmants et évidents, mais les pas que l’on fait ne sont pas assez grands pour rétablir la situation.» Au bord du radeau qui prend l’eau, on peut se demander si la poignée de survivants se rendra au rivage…

VOUS VOULEZ Y ALLER?

Quoi: Le cri des méduses

Qui: Alan Lake Factori(e)

Où: salle Octave-Crémazie du Grand Théâtre

Quand: mercredi 4 avril et jeudi 5 avril à 20h



Billets: 50,50 $ (41,50 $ pour les étudiants et 65 ans et plus)

Info: 1 877-643-8131