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Un lecteur «fidèle» estime que j’ai «félicité» Gaétan Barrette en écrivant qu’il avait «osé imposer sa loi». Il m’accuse de ne pas avoir fait «la moindre allusion» à la manière utilisée.
Une lectrice, retraitée de la Protection de la jeunesse, me reproche de ne pas avoir abordé les services sociaux qui sont «mis en oubli» selon elle. «Le principal impact [de la politique du ministre] est que les services sociaux sont perdus à travers la Santé» écrit-elle. Elle reconnaît que ce domaine relève de la ministre Lucie Charlebois, mais elle estime que j’aurais dû demander des comptes au Dr Barrette.
Une autre lectrice, qui travaille dans le domaine de la santé, me dit que le simple fait de voir Gaétan Barrette lui donne la nausée. Elle déplore «la détérioration des services qui ne s’observe malheureusement pas par des chiffres, les outils préférés de M. Barrette, mais par la vie sur les unités de soins et dans le milieu de travail». Elle dresse un tableau sombre du milieu : «La démotivation du personnel est palpable, les absences de maladie, le type de gestion qui s’apparente à la loi d’Omerta, l’instauration de guichets uniques, la sainte centralisation qui augmente les délais auparavant inexistants. En 37 ans de carrière, je n’ai jamais assisté à une telle déchéance».
Et pour clore ces critiques virulentes, un collègue du journal Le Droit d’Ottawa m’informe qu’un comité de citoyens indépendant, dont l’ancien maire de Hull Michel Légère, a publié un rapport sur la détérioration des soins dans le Pontiac. «Évidemment, le ministre a traité le rapport de tous les noms, et même insulté Légère au passage», m’écrit mon collègue.
Bref, c’est un procès en règle de la réforme Barrette et du ministre que ses détracteurs auraient aimé lire.
Soyons réalistes : on ne dresse pas un tel bilan dans une chronique d’une demi-page, et ce n’était pas le but de ma démarche. Mon objectif était de vérifier les intentions et les constats du ministre le plus controversé du gouvernement, après trois ans à la tête de la Santé. Résultat, Gaétan Barrette ira jusqu’au bout de sa réforme, même s’il doit le faire sur les banquettes de l’opposition après les élections d’octobre 2018. Il n’est pas question pour lui de faire comme Monique Jérôme-Forget et de quitter la politique six mois après les élections.
Bien sûr, il serait intéressant de tirer des constats complets et crédibles de la réforme Barrette, mais elle n’est pas terminée. Même les questions de l’opposition à l’Assemblée portent généralement sur «l’arrogance» du ministre ou les failles du système dans un établissement, ou une région, au lieu de s’intéresser à l’ensemble de l’œuvre.
Il est clair que le style Barrette pose problème pour de nombreux intervenants du milieu. «On a affaire avec un individu qui croit tout connaître et qui agit avec une improvisation qui nous amène on ne sait où», m’écrivait lundi encore un médecin de Québec. Mais au-delà de la personnalité du ministre, les problèmes du réseau de la Santé ne datent pas d’hier. Ceux qui couvrent la politique québécoise depuis longtemps se rappellent le recours à des huissiers, sous François Legault, pour forcer des urgentologues à faire une garde de nuit au Saguenay. Ou encore de l’envoi de cancéreux à Plattsburgh et à Burlington pour y recevoir des soins sous Pauline Marois en 1999. Est-ce pire sous Gaétan Barrette?Difficile à dire, mais il ne serait pas sérieux de tirer des conclusions aussi tôt.