Nos musées, «miracles et trouvailles d'ingéniosité»

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Où partez-vous en vacances cet été? Connaissez-vous les musées dispersés aux quatre coins de la province? Le livre Architectures d'exposition au Québec, lancé le 6 avril, pourrait vous donner envie de bifurquer vers ces édifices pleins de caractère. Le coauteur Jacques Plante parle de «miracles et trouvailles d'ingéniosité».


«Nos musées sont loin de faire pâle figure. Il y a une véritable qualité d'architecture et on a peu à envier aux autres pays, si ce n'est les budgets consacrés à la culture...», lance l'architecte reconnu et professeur à l'Université Laval. Avec son confrère Nicholas Roquet de l'Université de Montréal, il propose un ouvrage fouillé où 36 projets sont présentés en mots, en photos, en plans et en coupes, assez simplement expliqués pour situer le lecteur dans l'édifice.

Alors que le pavillon Pierre-Lassonde du Musée national des beaux-arts du Québec prend forme dans la capitale, le livre s'y penche et révèle même que de la peinture or sera appliquée sur des murs de béton de l'ascenseur. Ce «lingot» rappellera ainsi que «tout musée est un trésor pour la société qui le bâtit». 



Les pages suivantes sont consacrées au pavillon pour la paix Michal-et-Renata-Hornstein du Musée des beaux-arts de Montréal, lui aussi en construction. Difficile de ne pas comparer les deux projets en devenir et de constater l'audace du deuxième, avec ses volumes contorsionnés et ses languettes verticales de pierre calcaire de Montréal. La conceptrice Manon Asselin a du «torque», reconnaît Jacques Plante à qui l'on demande son avis.

Mais loin de lui l'envie de qualifier le travail de ses confrères et consoeurs qui sont souvent des amis. «C'est un ouvrage de vulgarisation et non pas un ouvrage critique.» Le duo d'auteurs a surtout voulu montrer les qualités de l'architecture de chez nous qui est assez identitaire, différente de celles des Américains et des Européens. Le lecteur est ensuite libre de juger. 

D'ailleurs, le livre se lit à la carte, selon les préférences de tout un chacun. Jacques Plante salue l'initiative de Nicholas Roquet d'avoir classé les musées par «familles». «Ce n'est pas construit comme un roman et ce n'est pas un ouvrage chronologique.» Il y a l'architecture des beaux-arts, des sociétés, du temps, du paysage, des sciences... «On va du plus petit jusqu'aux planètes», dit-il en référence au Planétarium de Montréal.

Le choix des musées a été fait en fonction de leur importance, de concours, de prix obtenus, mais aussi de coups de coeur. «On a voulu montrer des lieux, des trouvailles, sans faire abstraction des grands musées, qui ont besoin d'un peu moins d'aide», mentionne Jacques Plante.



Il a parfois fallu prendre l'avion et faire quelques heures de route pour aller s'imprégner des lieux. Oujé-Bougoumou, ce n'est pas au coeur de l'Afrique, mais bien au nord-ouest de Chibougamau, précise l'architecte. Là est érigé l'Institut culturel cri Aanischaaukamikw, le plus récent musée entièrement consacré à une Première nation du Québec.

«C'est exceptionnel, l'architecture des musées autochtones. Il faut les montrer», insiste Jacques Plante en parlant aussi du Musée des Abénakis à Odanak ou de Shaputuan à Uashat. La couverture du livre les met d'ailleurs en évidence. Alors que l'endos annonce ce qui s'en vient, avec trois projets.

Les coauteurs ont pu compter sur l'aide et le réseau de Michel Côté, ancien directeur des Musées de la civilisation et «mentor». C'est d'ailleurs lui qui a insisté pour que ce livre voie le jour. Un troisième ouvrage pour Jacques Plante, qui a écrit en solo Architectures du spectacle au Québec en 2011 et Architectures de la connaissance au Québec en 2013, consacrés aux théâtres et aux salles de spectacle, puis aux bibliothèques.

Mais la trilogie consacrée aux projets culturels pourrait s'agrandir. «Il y a un quatrième livre en réflexion sur les places publiques», glisse Jacques Plante, qui trouve un peu prématuré d'en parler. Laissons d'abord la place des Canotiers devant le Musée de la civilisation surgir.

Architectures d'exposition au Québec, édité par Les Publications du Québec, (44,95 $) sera lancé au Musée de la civilisation le 6 avril.

<p>Jacques Plante, coauteur du livre, signe le troisième tome d'une trilogie consacrée aux projets culturels du Québec.</p>

Jacques Plante, coauteur du livre, signe le troisième tome d'une trilogie consacrée aux projets culturels du Québec.

(Courtoisie/Courtoisie)

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Onze auteurs des milieux architectural et muséal ont pris la plume et bonifié d'analyses le premier quart du livre Architectures d'exposition au Québec. Une écriture plus spécialisée pour ceux qui veulent approfondir le rôle du bâtiment par rapport à ce qu'il contient. On met en question comment être moderne et contemporain, on se tourne vers l'international, on évoque les concours d'architecture. On revient aussi sur des projets inachevés, comme le Musée du Séminaire, devenu Musée de l'Amérique française, puis Musée de l'Amérique francophone, pour lequel on a rêvé un grand aménagement souterrain au tournant des années 1990. «On a voulu ranimer des choses pour que l'histoire ne se perde pas, nous faire penser que des projets n'ont pas eu lieu. En plus d'être un livre de référence, c'est un livre de mémoire», croit le coauteur Jacques Plante.

La préface signée Jean-Paul L'Allier

La préface du livre prend une dimension bien particulière, puisqu'elle est de Jean-Paul L'Allier. «On était très fiers qu'il accepte de la faire», souligne Jacques Plante à propos de l'ancien maire de Québec, homme de culture, de patrimoine et d'urbanisme, décédé le 5 janvier. Sans oser dire que ce texte est un testament, il rassemble ses réflexions sur la culture et les musées et s'adresse aux décideurs. Titrée «Investir ou dépenser?», la préface prône l'ouverture, la diffusion, le partage et parle de fierté. Jean-Paul L'Allier remet en question la règle du «plus bas soumissionnaire», constate que «faire beau» est un investissement, «faire ordinaire» est une dépense et «faire un lieu impersonnel et anonyme» peut s'avérer du gaspillage.