Une pétition déposée au mois de décembre par le comité Opération Verre-Vert sur le site de l'Assemblée nationale du Québec a récolté près de 15 000 signatures. Elle demande à la SAQ d'adhérer à un système de consigne des bouteilles de vin et de spiritueux plutôt que d'utiliser le système de collecte sélective. La pétition, qui est pilotée par la députée de Québec solidaire Manon Massé, est terminée depuis le 25 février. Elle devrait être déposée aux alentours du 18 mars.
Dans le libellé de la pétition, on souligne notamment que «la majorité du verre récupéré par la collecte sélective ne peut pas être recyclé, car il se contamine au contact des autres matières» et «qu'au Canada, seuls le Manitoba et le Québec ne consignent pas le verre des bouteilles de vin et de spiritueux».
«Ce n'est pas juste la SAQ qui doit agir, mais dans toute bonne lutte, il faut commencer quelque part», confie au Soleil Estelle Richard, porte-parole d'Opération Verre-Vert. «Nous avons décidé de viser la SAQ parce qu'elle met actuellement sur le marché énormément de bouteilles de verre. Environ 80 % des contenants de boisson en verre non consignés se trouvant dans le bac de récupération proviennent de la SAQ. Selon nous, elle a comme responsabilité d'offrir une vie écologiquement viable au produit; trouver une façon de le recycler. Cependant, ce n'est pas une décision qui relève simplement de la SAQ, le ministère de l'Environnement a clairement aussi un rôle à jouer.»
Mme Richard estime que l'argent investi présentement par la société d'État dans des technologies pour être en mesure de mieux trier le verre et d'en faire notamment de la poudre pour le béton n'est pas la meilleure option. «Selon nous, ce n'est pas viable. D'une part, parce que cela coûte très cher et que ce n'est pas tous les centres de tri du Québec qui seront capables de s'offrir la machinerie nécessaire et en plus, ce n'est pas du recyclage. Du verre, lorsqu'il est bien trié en dehors du bac bleu, c'est infiniment recyclable.»
Afin que le verre soit le mieux recyclé possible, la porte-parole d'Opération Verre-Vert réitère l'idée de mettre en place des centres de dépôt. «On retrouve cette stratégie dans plusieurs provinces canadiennes, par exemple en Nouvelle-Écosse. Par contre, nous devrons peut-être avoir des systèmes parallèles, car c'est vrai que certains locaux de la SAQ sont très petits. C'est parfois plus difficile pour eux d'avoir un espace pour recevoir les contenants consignés.»
Aucune modification à prévoir
Selon des données du Syndicat des employés de magasins et de bureaux de la SAQ, qui sont en faveur de la consigne, les bouteilles de la société d'État (240 millions par année) sont récupérées à 94 % par la collecte sélective.
Quant à la Ville de Québec, elle a officiellement adhéré à la fin janvier au mouvement Pro-Consigne réclamant la consigne de bouteille de vin à la SAQ.
Malgré la pression des groupes écologistes en faveur de la consigne, la SAQ n'a aucunement l'intention d'apporter des modifications à son système, jugeant qu'il est amplement efficace.
«Il y a actuellement un système qui existe, qui est la collecte sélective dans lequel on a confiance», avance Renaud Dugas, porte-parole de la société d'État. «Pour la consigne, il y a encore beaucoup de questions sans réponse, notamment sur les retours des bouteilles. De plus, ce n'est pas pensable [la consigne], ça ne peut pas être à la SAQ. On ne possède pas les infrastructures nécessaires et on n'a pas la place pour recevoir les bouteilles.»
Le porte-parole de la SAQ ajoute que ce n'est pas «80 % des contenants de boisson en verre non consignés se trouvant dans le bac de récupération qui proviennent de la SAQ, mais plutôt 50 %».
Pour la porte-parole du regroupement bacs+, Louise Fecteau, consigner les bouteilles de vin n'est pas la solution; au contraire, cela causerait de nombreux problèmes. «On nous dit que la consigne sur les bouteilles de vin réglerait le problème du verre dans les centres de tri, mais ça n'a pas encore été documenté. Plusieurs centres de tri n'ont pas de problème de tri avec le verre, les technologies existent. Réglons le problème là où il se trouve, soit auprès de quelques centres de tri. Il n'y a que 34 centres de tri au Québec, et la majorité n'ont pas de problème.»
«Consigner les bouteilles de vin signifie instaurer un réseau de centres de dépôt qui n'existe pas et qui se superposera à celui de la collecte sélective porte-à-porte, payée à 100 % par les producteurs d'emballages, de contenants et d'imprimés», ajoute Mme Fecteau. «De plus, nous comparer aux autres provinces est nous demander de rétrograder. Les autres provinces ont des systèmes sophistiqués de consigne à défaut de système efficace de collecte sélective porte-à-porte! Le Québec est très en avance dans les faits.»
L'étude commandée par Québec devrait être déposée d'ici la fin mars
L'étude commandée par le gouvernement du Québec pour comparer la collecte sélective et le système de consignation devrait être déposée d'ici la fin mars.
Le Centre de recherche en économie de l'environnement, de l'agroalimentaire, des transports et de l'énergie (CREATE) de l'Université Laval avait été mandaté en 2013 par le ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs pour comparer les deux systèmes qui ont été sujets à plusieurs débats au cours des dernières années.
Au mois d'octobre, pour une première fois, le ministre de l'Environnement, David Heurtel, s'était montré ouvert à l'idée d'avoir une consigne du verre sur les bouteilles de vin.
Joint par Le Soleil vendredi, le porte-parole du ministre, Guillaume Bérubé a réitéré la position du gouvernement. «La consigne du verre fait partie de la réflexion que l'on doit avoir pour améliorer le système», a-t-il souligné. «On n'exclut rien pour le moment.»
Après avoir pris connaissance des résultats de l'étude, le gouvernement pourrait notamment exiger à la SAQ d'instaurer un système de consigne.
Avec Annie Mathieu