«Pour nous autres, c'est la différence entre avancer et faire du surplace», s'exclame le conseiller municipal Michel Patry, président de la STLévis.
Sans ce financement qui se fait attendre, des dossiers doivent être retardés, dit-il. En haut de la liste, le projet de voies réservées exclusives au centre du boulevard de la Rive-Sud. Une première section devait être construite dès cet automne entre la rue Saint-Omer et le boulevard Alphonse-Desjardins pour une mise en service en 2015.
L'appel d'offres pour les plans et devis, lancé le 5 février, ne sera pas mené à terme avant la réception du chèque manquant. Considérant que la saison des travaux est courte au Québec, il apparaît désormais impossible de mettre le chantier en branle avant 2015.
«Il faut être capable de financer les règlements d'emprunt», souligne Jean-François Carrier, directeur général. Si les plans et devis sont estimés entre 1 et 2 millions $, le projet de voies réservées dans son ensemble, inscrit au Plan québécois des infrastructures (PQI), totalise 25 millions $. C'est l'équivalent du budget annuel du transporteur.
M. Carrier affiche la même prudence pour les achats de minibus et d'autobus articulés prévus dans l'année. Pendant ce temps, le politique met de la pression sur le gouvernement à coup de résolutions.
Vieux litige
C'est le retour d'un vieux litige que tous croyaient réglé. Se rendant aux doléances des politiciens lévisiens, le gouvernement libéral de Jean Charest a décidé en 2011 d'accorder 1 million $ par année à la STLévis pour qu'elle boucle son budget d'exploitation. Gilles Lehouillier, alors député de Lévis et désormais maire, en avait fait une priorité électorale.
Cela faisait des décennies que Lévis se plaignait du détournement des 30 $ versés par les automobilistes pour le transport en commun lors du renouvellement de l'immatriculation de leur véhicule. Au lieu de servir à Lévis, l'argent était dirigé vers le Réseau de transport de la Capitale.
Même si 1,3 million $ sont en jeu, l'ex-mairesse de Lévis Danielle Roy Marinelli a accepté un arrangement temporaire de 1 million $. Il faut dire que le ministre des Transports de l'époque, Sam Hamad, avait annoncé que la situation serait régularisée dans la prochaine politique sur le transport collectif, mais celle-ci n'a toujours pas été adoptée. Elle a été présentée récemment par les péquistes, qui l'ont transformée en stratégie nationale de mobilité durable.
Le Parti québécois était au pouvoir quand il y a eu un premier découvert en 2013, puis en 2014. L'arriéré de 2013 a finalement été corrigé au début de mars, après le dernier Conseil des ministres précédant le lancement de la campagne électorale, avec le versement de 950 000 $.
La lettre de la sous-ministre des Transports, Dominique Savoie, précisait toutefois que cette aide n'était pas récurrente et conseillait à la STLévis de cogner à la porte du RTC pour obtenir son dû, raconte Michel Patry.
Celui-ci s'imagine mal quémander des sommes au voisin alors que c'est la répartition gouvernementale qui est problématique. «Je ne pense pas médire en disant que M. [Régis] Labeaume ne va pas être tenté de faire un chèque de 1,3 million à même le budget de sa société de transport parce qu'ils en ont besoin eux autres aussi», dit le président de la STLévis.
Avec le retour des libéraux au pouvoir, le maire Lehouillier et lui entendent réclamer à nouveau le règlement - permanent - de ce vieux différent.
Parlementaires protégés
Les «parlementaires», ces autobus qui mènent directement les usagers du transport en commun de Lévis vers la colline parlementaire et les autres grands pôles d'emploi de Québec, ne sont pas menacés par la réorganisation du réseau lévisien et l'harmonisation des services avec la Rive-Nord. Le directeur général de la Société de transport de Lévis, Jean-François Carrier, assure qu'il n'est pas du tout dans les plans de forcer des correspondances à Québec. «La préoccupation, c'est comment on pourrait améliorer la productivité de ces autobus-là», dit-il. Les matins et les après-midis de semaine, une quinzaine de parlementaires partent ou reviennent vides. L'objectif est donc de diminuer les «kilomètres improductifs», en temps et en pétrole, entre Lévis et Québec. L'une des solutions étudiées est de faire monter des clients du côté de Québec, mais il faudrait pour cela l'autorisation du Réseau de transport de la Capitale. La construction d'un garage à la tête des ponts est aussi envisagée.
Du diesel au tout-électrique
Les autobus de Lévis roulent toujours au diesel, mais les dirigeants de la société de transport rêvent eux aussi du tout-électrique. Les voies réservées centrales sur le boulevard de la Rive-Sud sont pensées pour accueillir des autobus électriques et même un éventuel tramway. La STLévis espère ainsi être en mesure d'escamoter le passage aux véhicules hybrides. «On sortirait du diesel et on s'en irait full électrique», résume le président Michel Patry, rappelant qu'il y a des coûts importants (mécanique, garages, formation) associés au changement de technologies. «Si tu en sautes une et tu t'en vas à l'autre, il y a des économies à faire», insiste-t-il. Après avoir détenu pendant plusieurs années un record de vieux autobus parmi les sociétés de transport du Québec, la STLévis possède désormais la flotte plus récente. La moyenne d'âge des véhicules étant de quatre ans, pour une durée de vie d'environ 16 ans; il reste plus d'une décennie pour trouver la bonne technologie de remplacement respectueuse de l'environnement.