Les plantes indigènes des latitudes élevées, comme le Québec, utilisent ces changements de durée du jour comme signal pour savoir quand se préparer à l'hiver. On appelle cet endurcissement l'aoûtement, car on commence à remarquer cette réaction dès le milieu d'août. À mesure que les jours raccourcissent, les végétaux pérennes indigènes commencent à pousser moins rapidement pour arrêter complètement peu après. Les feuilles de plusieurs espèces changent de couleur, puis chutent. Même les plantes dont le feuillage reste en place toute l'année, comme les conifères (la plupart conservent leurs aiguilles), arrêtent de faire de la photosynthèse quand les jours raccourcissent suffisamment.
La durée du jour est le facteur majeur dans ces changements, mais le refroidissement de la température joue aussi un rôle. En effet, les températures de plus en plus froides envoient aux plantes le signal d'arrêter leur croissance.
Pour un bon endurcissement au froid des plantes ligneuses, il faut que la baisse des températures à l'automne soit graduelle. Le même arbre qui peut tolérer des températures de - 35 °C en plein hiver gèlera à - 5 °C si le froid arrive en juillet, car il n'y est pas préparé. De même, un automne trop chaud peut être désastreux pour les végétaux s'il est suivi immédiatement d'un hiver froid. L'hiver dernier, on a vécu en janvier une période prolongée de froid intense qui aurait pu faire beaucoup de dégâts chez les végétaux ornementaux, mais l'automne dernier avait été «parfait» pour les plantes, les températures baissant graduellement d'octobre à la fin de décembre. Ainsi, la plupart des végétaux étaient bien préparés pour l'hiver et n'ont subi aucun dommage.
Les plantes indigènes sont très bien adaptées à la durée du jour et aux températures automnales de notre région et «savent» quand il est temps d'entrer en dormance. Les plantes importées de climats plus chauds ou à saison de croissance plus longue, par contre, ne savent pas lire les signaux aussi bien que les plantes locales. Ainsi, à la fin d'octobre, quand tous les arbres de la forêt d'ici ont déjà perdu leurs feuilles, les feuilles de l'érable de Norvège (Acer platanoides) restent encore vertes. Cet érable n'est pas d'ici, venant plutôt d'Europe, d'une région aux hivers plus courts que les nôtres. S'il y a une chute de neige hâtive, ce qui n'est pas inhabituel dans notre région, le poids de la neige sur toutes ces feuilles encore fixées sur les branches peut faire casser les branches de l'érable de Norvège ou même faire tomber l'arbre.
Voici un autre exemple de ce qui arrive quand une plante n'est pas correctement aoûtée. On vend parfois des «sapins vivants» - des conifères rustiques cultivés en pot - dans le temps des Fêtes. Normalement ces plantes pourraient tolérer jusqu'à - 35 °C l'hiver, mais si on rentre les pots à la chaleur, d'abord dans le magasin, ensuite dans la maison, pendant plusieurs semaines, les sapins perdent leur résistance au froid. Quand, après les Fêtes, on fait ce que l'étiquette indique et qu'on place ces sapins à l'extérieur, ils meurent des effets du froid.
L'effet sur la floraison
Le raccourcissement des jours affecte aussi la floraison. Nombre de plantes se mettent à fleurir à l'automne, malgré le froid. C'est le cas des chrysanthèmes, des asters, des sedums, des colchiques, des aconits, des hydrangées, des rudbeckies et de bien d'autres. Après tout, il y a un avantage à fleurir à l'automne : comme il y a moins d'autres fleurs, la compétition pour attirer les pollinisateurs est moindre. Les chances de se faire féconder par une abeille, un syrphe ou un autre insecte pollinisateur sont donc plus grandes. Plusieurs de ces plantes continueront de fleurir tout l'automne : seule l'arrivée de la neige arrêtera leur floraison.
La floraison de ces plantes est déclenchée par le décroissement du nombre d'heures d'ensoleillement : elles ne fleurissent que si elles ont subi des jours longs suivis de jours plus courts. Si vous placez un chrysanthème, par exemple, sous une lampe qui éclaire 14 heures par jour, il fera
beaucoup de feuillage, mais il ne fleurira jamais. Si par contre vous lui donnez des jours longs (14 heures d'éclairage quotidien et plus) pendant quelques semaines, puis que vous baissez la durée du jour à 12 heures ou moins, il se mettra à fleurir. C'est exactement ce qui se passe dans la nature : les jours prolongés du début de l'été stimulent la croissance végétative de ces plantes, mais il faut les jours courts de l'automne pour stimuler la floraison.
Des fleurs pour Noël
Même certaines plantes de climat plus chaud réagissent à la longueur du jour. Le poinsettia (Euphorbia pulcherrima) et le cactus de Noël (Schlumbergera spp.) sont des plantes à jours courts. Dans les vrais tropiques, il y a toujours 12 heures de soleil et 12 heures de nuit, à l'année, mais dans les régions subtropicales d'où viennent ces deux plantes, les jours ont un peu plus de 12 heures l'été et un peu moins de 12 heures l'hiver. Que les jours baissent juste un peu sous 12 heures par jour, et le poinsettia et le cactus de Noël commenceront à se préparer à la floraison. Mais si vous les placez dans une pièce éclairée le soir, où donc les jours sont prolongés artificiellement en soirée, ils ne fleuriront pas, car alors ils subissent l'équivalent de jours longs. Pour faire fleurir un poinsettia ou un cactus de Noël, placez-les dans une pièce qui est éclairée le jour, mais qui ne reçoit pas le moindre éclairage le soir et leur floraison suivra 8 à 10 semaines plus tard.
Et quand commencer à faire subir le traitement aux jours courts en vue d'avoir des fleurs à Noël? Mais demain, bien sûr, à l'équinoxe automnal!
Bon automne!