Charte des valeurs québécoises: une menace au recrutement à l'étranger?

Alain Kirouac, président et chef de la direction de la Chambre de commerce et d'industrie de Québec.

«Il faut se poser la question avant d'aller plus loin dans le débat sur la Charte des valeurs québécoises. Quelle image du Québec voulons-nous donner aux hommes et aux femmes que l'on cherche à attirer ici pour pourvoir tous les postes vacants au sein de nos entreprises?»


Président et chef de la direction de la Chambre de commerce et d'industrie de Québec, Alain Kirouac s'interroge sur les conséquences des projets du gouvernement du Parti québécois en matière de valeurs québécoises et de laïcité (qui ne s'appliquent qu'aux organismes publics) sur le recrutement de travailleurs étrangers. Ces derniers voudront-ils venir gagner leur vie dans une province qui veut se doter d'une charte de la laïcité «liberticide, discriminatoire et exclusive», comme le dénonçait sans ménagement mercredi le Congrès maghrébin du Québec?

Ces critiques acerbes, selon M. Kirouac, finissent toujours par trouver des échos partout à travers le monde, particulièrement auprès des travailleurs qui songent à s'expatrier pour aller vivre une nouvelle aventure professionnelle.



«Il ne faut pas donner l'impression ou véhiculer la perception que le Québec n'est pas une terre d'accueil apte à recevoir des gens de toutes provenances et de toutes religions», affirme Alain Kirouac en entrevue au Soleil. «Il faut être très prudent dans le message que nous envoyons à l'étranger.»

Il rappelle que la région de Québec n'était pas seule dans la course aux meilleurs talents. Ailleurs au Canada et aux États-Unis, les entreprises s'arrachent les ressources humaines qui leur permettront de poursuivre et d'accélérer leur développement. Elles y mettent généralement le paquet pour aller chercher les plus beaux cerveaux. Québec n'a pas les moyens de se sortir de la course.

Conditions gagnantes

Selon lui, la région est parvenue, ces dernières années, à aligner les «conditions gagnantes» lui permettant de devenir une terre d'accueil qui n'a rien à envier aux grandes villes nord-américaines.



Québec International et ses partenaires ont multiplié les missions de recrutement à l'étranger. La Ville de Québec a adopté une Politique d'accueil, d'intégration et de rétention des personnes immigrantes. Les résultats parlent d'eux-mêmes, estime le président et chef de la direction de la Chambre de commerce et d'industrie de Québec. Depuis mars 2008, les missions de recrutement en Europe, en Afrique et en Amérique du Sud ont attiré près de 900 travailleurs. En incluant conjoints et enfants, ça totalise plus de 2110 nouveaux arrivants dans la capitale.

«Et notre taux de rétention est très fort», ajoute-t-il. Dans les faits, il se chiffre à 95 % selon Québec International.

«Ça veut dire qu'en général, nos entreprises accueillent bien les ressources humaines venues de l'étranger», insiste-t-il en reconnaissant que l'on pouvait toujours trouver des cas, ici et là, où l'intégration a été plus difficile.

«Tout ce qui a été accompli depuis une vingtaine d'années en matière d'immigration demeure très fragile», prévient M. Kirouac. «Il ne faudrait surtout pas fermer le pipeline de beaux talents qui nous provient d'un peu partout sur la planète.»

Selon lui, le problème auquel s'attaque la Charte des valeurs québécoises est difficilement perceptible à Q uébec. «Est-ce un problème typiquement montréalais? À partir de notre bout de lorgnette, ici à Québec, on peut se poser la question.»