Le projet de Charte des valeurs québécoises «inquiète» Justin Trudeau

De passage à Québec mercredi, Justin Trudeau a mentionné que la Charte des valeur que met au point le ministre Bernard Drainville «ne va pas dans la bonne direction». Le chef du PLC prédit «qu'il y aura même un fort ressac.»

Le projet du gouvernement Marois pour une Charte des valeurs québécoises joue sur un réflexe de «peur», affirme Justin Trudeau. Le projet «inquiète» le chef libéral, mais il se retournera contre le Parti québécois, croit-il.


Mercredi après-midi, M. Trudeau a payé une première visite au bureau de l'Assemblée nationale de Pauline Marois depuis qu'il dirige les libéraux fédéraux. La proposition de Charte des valeurs, qui tapisse les pages des journaux et meuble les bulletins d'information, n'a évidemment pas été évitée pendant la discussion.

«Nous ne nous sommes pas entendus là-dessus», a commenté avec le sourire le meneur du Parti libéral du Canada. «Elle et moi avons commencé un débat qui se poursuivra au cours des prochains mois», a-t-il laissé tomber en sortant de la rencontre.



Sur un ton plus sérieux, Justin Trudeau a suggéré que, même s'il attend de lire une version officielle de ce qui sera présenté à Québec, «dans ce que j'ai entendu, il y en a assez pour m'inquiéter».

«On est peut-être en train de répondre à des besoins qui n'existent pas. Je ne comprends pas quels droits sont en train d'être protégés par cette charte qui ne le sont pas dans notre Charte québécoise ou la Charte canadienne des droits et libertés», cette dernière ayant été votée, il y a une trentaine d'années, sous Pierre Elliott Trudeau, alors premier ministre canadien.

«Un pas trop loin»

Le chef des libéraux à Ottawa a refusé de parler de xénophobie pour le projet qui irait «un pas trop loin» en interdisant aux employés de l'État d'afficher des signes religieux de façon ostentatoire. «Pour moi, l'État et ses institutions doivent être neutres. Mais l'individu a le droit de s'exprimer, a droit à sa religion.»



Dans les éléments qui se retrouvent sur la place publique, «j'ai dit que c'est peut-être un encouragement de cette peur que de dire que quelqu'un qui porte le voile ne peut pas représenter l'État neutre, a-t-il soulevé. Je comprends ce réflexe», a-t-il pris soin de dire en plaidant que la culture et la langue française du Québec ont pu «survivre [...] par un réflexe défensif».

Mais la Charte des valeurs que met au point le ministre québécois Bernard Drainville «ne va pas dans la bonne direction». Il a prédit «qu'il y aura même un très fort ressac [...] au Québec même. Beaucoup de gens ne se reconnaîtront pas dans ce projet».

M. Trudeau refuse de croire qu'une majorité de Québécois est d'accord avec le bannissement préconisé des signes religieux.

Il a rappelé au pays que c'est au Québec que se trouve la plus forte proportion de citoyens endossant la Charte canadienne des droits et libertés. Il a profité de sa rencontre avec les médias pour rappeler que la saga entourant le bannissement temporaire du turban pour les jeunes joueurs de soccer a été un objet de risée à travers le Canada et à l'étranger.

Justin Trudeau a assuré que lui et Mme Marois sont tombés d'accord sur un certain nombre de sujets. C'est le cas pour dénoncer la réforme de l'assurance emploi que pousse le premier ministre fédéral Stephen Harper. Une réforme du gouvernement conservateur qui «est complètement irresponsable» en raison de «l'impact sur les régions et les travailleurs saisonniers, dont au Québec».