Entre 2008 et cette année, Lauberivière a vu une augmentation de 43 % du nombre d'hommes qu'elle accueille pour les 15 premiers jours du mois de décembre. En 2008, l'organisme avait offert un total de 349 nuitées pour cette période, contre 530 cette année. Le dortoir des hommes contient 39 lits, et à quatre reprises depuis le début du mois, quelques lits d'urgence ont dû être disposés dans les corridors afin d'accommoder le surplus d'itinérants dans le besoin.
«J'ai vraiment de la difficulté à comprendre ce qui se passe, parce que traditionnellement, le mois de décembre, c'est mon mois le plus tranquille au niveau de l'hébergement», explique Éric Boulay, directeur général de la Maison de Lauberivière.
Au début de l'implication de M. Boulay à Lauberivière, il y a une quinzaine d'années, la majorité des sans-abri était des individus ayant d'importants problèmes de consommation d'alcool. Maintenant, cette clientèle s'est beaucoup diversifiée, et parmi les nombreux cas de problèmes de santé mentale, on retrouve des gens parfaitement sains d'esprit qui sont seulement rendus au bout de leurs ressources financières.
Même si la région affiche un taux de chômage très bas, M. Boulay rappelle que le taux d'inflation fait mal à de nombreux ménages et que la basse classe moyenne en arrache de plus en plus, notamment avec l'augmentation fulgurante du coût des aliments.
Signe que l'économie ne va pas si bien que ça, M. Boulay remarque aussi que les citoyens et les entreprises font moins de dons en nourriture à Lauberivière ces temps-ci que par les années passées.
«D'habitude, à cette période de l'année, nos réfrigérateurs sont remplis à capacité, et ce n'est pas le cas présentement.»
Sans travail
Le journaliste a rencontré un des nouveaux pensionnaires de la Maison de Lauberivière depuis quelques jours.
Paul (nom fictif) voulait se rendre à Calgary pour travailler dans le domaine de la construction, mais il n'a pas l'argent pour aller en Alberta. Paul était travailleur autonome jusqu'à il y a quelques mois. Sans travail présentement, il ne peut donc pas bénéficier de chèques d'assurance emploi. Il a logé chez son frère durant quelques mois, mais il a décidé de quitter la demeure de son frère parce que ce dernier se remet d'une grave opération. «J'ai même passé une nuit dans ma voiture. J'avais pas de place où aller.»
Par le passé, Paul dit avoir déjà participé à des activités de financement avec les Chevaliers de Colomb pour aider des organismes communautaires comme Lauberivière. Aujourd'hui, il doit avoir recours à cet ultime filet de sécurité.
Malgré tout, il dit avoir une bonne santé mentale et assure ne pas être pris avec des problèmes de consommation. Il croit donc être en mesure de trouver une solution au pétrin dans lequel il se trouve.
«Je me sens privilégié dans le fond. Je me sens privilégié d'avoir le moral que j'ai.»