Rédigé par le chercheur de l'Université de Waterloo Scott Walbridge et l'ingénieur Alexandre de la Chevrotière, du Groupe Maadi (une entreprise spécialisée dans les structures d'aluminium), le document reconnaît d'emblée qu'un pont coûte plus cher à construire en «alu» qu'en acier - autour de 70 % plus cher. Mais, plaident les auteurs, certaines des caractéristiques de l'aluminium peuvent, dans certaines circonstances, compenser amplement cet écart de coût.
Contrairement à l'acier, en effet, l'aluminium ne rouille pas, ce qui signifie qu'on n'a pas besoin de le peinturer périodiquement pour en retarder la corrosion. Dans le cas de certaines structures ou parties de structure qui sont difficiles d'accès, et donc très chères à repeindre, cela peut faire une grosse différence quand on tient compte des coûts engagés sur toute la vie utile de l'ouvrage.
«Nous, on ne demande pas de tout construire en aluminium, mais on dit qu'il faut mettre le bon matériau au bon endroit, alors qu'à l'heure actuelle, ce n'est même pas considéré. [...] Tant que nos gouvernements vont fonctionner avec le système d'appels d'offres du plus bas soumissionnaire, l'aluminium n'aura aucune chance, parce qu'on ne regarde pas le long terme, tout ce qu'on dit c'est qu'il ne faut pas que ça coûte cher au départ. Mais on voit avec les nouvelles qui sont sorties depuis quelques mois que le coût d'acquisition le moins cher finit parfois par coûter plus cher à long terme», indique M. de la Chevrotière.
En outre, d'un point de vue environnemental, l'aluminium se recycle à 100 %, ce qui n'est pas le cas de l'acier - que l'on perd à mesure qu'il rouille. Et sur le plan économique, poursuit M. de la Chevrotière, «le Québec est le quatrième producteur mondial d'aluminium, mais on est bon dernier en transformation». Un coup de barre de la part du gouvernement pourrait donc donner un coup de pouce à la transformation.
Mais ce matériau fait face encore à de grandes résistances dans les milieux de la construction. «Quand je suis arrivé en poste, il y a trois ans et demi, on a constaté que le Québec avait un sérieux retard sur la connaissance du rôle que peut jouer l'aluminium dans les infrastructures, relate Jean Simard, de l'Association canadienne de l'aluminium, qui a commandé l'étude. On a réalisé que le plus gros frein à l'utilisation de l'aluminium était l'ignorance, mais aussi parfois la mauvaise foi. [...] Dans certaines instances qui préparent des plans et devis et où on a fait la démonstration des avantages de l'aluminium, ils vont souvent retourner vers des solutions plus traditionnelles [l'acier, N.D.L.R.].»