Initiatives pour attirer de nouvelles familles dans le Bas-St-Laurent

Hélène Malenfant, directrice générale à Saint-Paul-de-la-Croix

«Je suis née ici, j'adore la qualité de vie et je n'ai pas l'intention d'aller m'installer ailleurs.» Directrice générale à Saint-Paul-de-la-Croix, Hélène Malenfant n'a aucune envie de quitter son patelin de 381 citoyens. Toutefois, comme d'autres, celui-ci est en décroissance démographique. Conscients, les élus se sont retroussé les manches pour attirer de nouvelles familles.


«En juillet, nous avons organisé une journée Pleins feux durant laquelle nous avons proclamé notre propre politique d'accueil des nouveaux arrivants qui renferme des incitatifs pour les familles désireuses de s'installer ici», raconte Mme Malenfant, précisant que la politique familiale, qui touche tous les groupes d'âge, a été renouvelée.

Selon Majella Simard, professeur au département d'histoire et de géographie de l'Université de Moncton, le dépeuplement des petites localités rurales ne date pas d'hier. Il y a 11 ans, Québec a adopté une politique de la ruralité afin justement de donner un nouveau souffle à ces municipalités. Malgré ses avantages, celle-ci ne semble pas avoir réussi à freiner le dépeuplement des milieux ruraux dont la population est inférieure à 500 habitants.



«Au Québec, en 30 ans, 91 petites localités ont perdu plus du quart de leur population. De ce nombre, 30 se trouvent au Bas-Saint-Laurent», dit le professeur, citant entre autres Saint-François-Xavier-de-Viger, Saint-Athanase, Trinité-des-Monts, Esprit-Saint et Saint-Paul-de-la-Croix. «Ces municipalités sont en processus de décroissance démographique continue depuis 1956, alors que sept autres ont perdu 80% ou plus de leur population depuis 1951: Routhierville, Saint-Charles-Garnier, Saint-Guy, Trinité-des-Monts, Saint-Pierre-de-Lamy, Notre-Dame-des-Sept-Douleurs et Saint-Jean-de-Cherbourg.»

Pour en arriver à ce constat, M. Simard a comparé les récentes données de Statistique Canada avec celles d'avant la mise en place de la politique de la ruralité. «Le nombre de personnes qui choisissent de s'établir dans un milieu rural est aussi en perte. Entre 2006 et 2011, ceux-ci ont accueilli 9276 citoyens, soit 464 de moins que pour les cinq années précédentes», dit-il, précisant qu'entre 2001 et 2011, le nombre de localités affectées par la décroissance démographique est passé de 434 à 472.

Malgré ce constat, Majella Simard note que cette politique a eu des effets positifs. «En soutenant divers projets, celle-ci a contribué à stimuler le développement local en plus de renforcer le sentiment d'appartenance des ruraux. Il est donc aussi légitime de se demander quelle serait la situation socioéconomique de ces milieux fragiles si cette politique n'avait pas vu le jour.»

Repeupler les villages



Périodiquement, dans les villages aux prises avec une baisse démographique, des services publics, comme un bureau de poste ou une école, sont menacés de fermeture. «Notre école compte 17 enfants, alors que le minimum requis est de 20. Nous avons réussi à obtenir un délai de la commission scolaire, car nous travaillons fort pour attirer des jeunes familles, notamment avec notre député», note Mme Malenfant.

Sensibilisé au phénomène, le député de Rivière-du-Loup-Les Basques, Jean D'Amour, a élaboré le projet Cinq maisons cinq familles, qui vise à attirer des nouvelles familles dans les villages, notamment en leur facilitant l'accès à des terrains. «Les gens nous appellent d'aussi loin que Montréal pour s'informer. Ils veulent acheter une maison, mais les prix sont trop élevés dans leur milieu», explique Chantal Dolan, attachée de presse du député. «Les 22 municipalités participantes de notre MRC offrent des terrains à moins de 5000$ ou gratuits.» Aucune famille n'a encore officiellement déménagé grâce à ce concept. «Ça s'en vient», lance Mme Dolan.

À Saint-Paul-de-la-Croix, où l'âge moyen est de 50 ans, on se dit certain que des solutions existent. «Nous travaillons tous ensemble pour que le résultat soit positif. Le programme du député D'Amour est un incitatif très intéressant, et les villages doivent l'inclure à leurs efforts pour démontrer leur dynamisme», conclut Mme Malenfant.

Pour Majella Simard, les gouvernements devraient accorder un statut de zone prioritaire aux municipalités qui vivent un dépeuplement très avancé. «Il faut encourager les initiatives de développement économique orientées vers la deuxième et troisième transformation des ressources, la diversification économique et l'économie sociale. Ce statut devrait également comporter une clause visant à préserver les services de proximité, un dispositif de rétention des jeunes et des personnes âgées et des mesures particulières destinées à encourager l'accroissement du taux de natalité».

Un milieu dynamique

Baisse démographique et dévitalisation sont deux réalités très différentes. Dans les villages, la vie communautaire est souvent très active. Même chose pour l'activité économique. À Saint-Paul-de-la-Croix, plusieurs petites et moyennes entreprises diversifiées procurent de l'emploi.



«Nous avons une école primaire, un service de transport scolaire, un bureau de poste, une bibliothèque avec un centre d'accès communautaire à Internet, une hydromiellerie, des menuisiers, entreprises d'alimentation, de transformation du bois et d'autres qui fournissent chacune quelques emplois», raconte Hélène Malenfant, qui vante les mérites de sa municipalité, située à 30 minutes de Rivière-du-Loup. «C'est central, il y a tous les services importants. Nos avantages sont différents de ceux de la ville, mais ils sont nombreux», dit celle qui n'est partie que quelques années pour aller étudier à Rivière-du-Loup.

Majella Simard espère que le Plan d'action gouvernemental à l'intention des municipalités dévitalisées conjugué à la récente Stratégie pour assurer l'occupation et la vitalité des territoires contribueront à ralentir le processus de dépeuplement. «Sinon, le Québec risque de se voir amputer tout un pan de l'espace rural pourtant riche en ressources naturelles, humaines et matérielles.»