La scène est typique. Les collègues s'assemblent autour du bureau de la jeune maman, qui prend un malin plaisir à montrer comment grandissent ses deux petits monstres. À une autre époque, elle aurait sorti ses photos de son portefeuille, mais, signe des temps, c'est une jolie vidéo qu'elle fait jouer sur son ordinateur, sous le regard attendri des curieux tout autour.
La responsable de cet attroupement est la collègue Stéphanie Martin. Elle avait préparé chez elle un diaporama avec des photos de ses petits mousses qui jouent aux cow-boys à la maison. Dans le logiciel gratuit iPhoto, que plusieurs utilisent sur Mac, elle choisit une chanson d'accompagnement à son diaporama. Le logiciel le propose You've Got a Friend in Me, entendue dans Histoire de jouets. Jusque-là, tout va bien. Fière, surtout de ses enfants, mais aussi de son chef-d'oeuvre cinématographique, elle décide d'envoyer le tout aux grands-parents via Facebook.
Mais, surprise, la machine refuse de prendre la vidéo, puisqu'elle viole des droits d'auteur. «Votre vidéo a été retirée, car elle semble contenir des matériaux, comme des clips vidéo ou un fond sonore, appartenant à des tiers», affiche Facebook en grosses lettres.
Elle jure qu'elle n'a pourtant jamais piraté une chanson... Mais aussi étonnée soit-elle, Facebook avait raison. Et ce serait aussi le cas pour toute chanson, vidéo ou photo dont vous ne détenez pas les droits, qu'elles soient publiées sur Facebook ou sur YouTube. Ces sites, évidemment, exigent que le contenu qui y est publié n'enfreigne pas la propriété intellectuelle d'autrui.
Utilisation personnelle
Dans le cas qui nous occupe, c'est la chanson du logiciel iPhoto qui pose un problème. «Puisque la musique m'était proposée par le logiciel, je n'ai jamais pensé que je pouvais enfreindre le droit d'auteur», se défend-elle. Mais une porte-parole d'Apple a confirmé, hier, par courriel, que «la licence de la musique dans iPhoto est pour une utilisation personnelle», ce qui ne donne aucun droit aux utilisateurs de la publier.
Cette façon de faire soulève aussi des questions de vie privée, à savoir comment Facebook a pu détecter qu'une chanson se trouvait dans la vidéo. Évidemment, «au nombre de millions [de vidéos] qui entrent, personne ne regarde tout ça!» explique la spécialiste des médias sociaux Michelle Blanc. Elle ajoute que les médias sociaux détectent ce genre de matériel à l'aide d'une signature électronique dans le ficher qui indique la présence de matériel protégé, ou encore en reconnaissant une série de caractères qui correspondrait au titre d'une oeuvre.
Une porte-parole de Facebook a de son côté confirmé au Soleil que Facebook, «comme plusieurs sites qui hébergent des vidéos, utilise la technologie pour identifier les possibles violations de droits d'auteur» et que ce «système a pour but d'aider tout le monde en alertant les usagers qui, sans le savoir, pourraient envoyer des vidéos qui violeraient des droits d'auteur».
Les distributeurs de disques et de films aux États-Unis, poursuit Mme Blanc, n'hésitent plus à poursuivre les individus qui violent les droits d'auteur sur Internet. La prudence s'impose.