Bhoutanais à Québec: une surprise, le français

La famille Raisaly tâche d'apprendre le français afin de pouvoir mieux s'intégrer à sa société d'accueil et d'enfin travailler.

«Ç'a été une grande surprise lorsque je me suis aperçu que personne ne parlait anglais.» C'était le premier choc culturel de Geeta Rasaily quand elle a mis les pieds à Québec. La Bhoutanaise connaissait le Canada comme un pays anglophone. Elle ne connaissait toutefois pas cette exception que constitue le Québec.


Apprendre la langue est donc la première préoccupation des Bhoutanais, installés principalement à Vanier et à Limoilou, depuis 2009. Et ils ont hâte de s'intégrer, d'y travailler. C'est palpable.

Alors que les plus jeunes ont la chance d'aller à l'école et d'ainsi apprendre la langue plus vite, les plus vieux ont plus de difficulté, puisque leurs amis sont eux aussi bhoutanais. Encore plus difficile pour la centaine de personnes âgées qui dépriment à être coupés du monde dans lequel ils vivent.



Ils souhaiteraient bien interagir plus avec les Québécois, mais «quand nous parlons français, personne ne nous comprend», dit la femme dans un anglais impeccable, sourire en coin. Ils auront appris la langue de Shakespeare dans ce camp de réfugiés népalais où ils sont demeurés pendant 18 ans. C'est d'ailleurs ce qui les aide à intégrer la communauté québécoise.

Cette surprise de s'apercevoir que le Québec était francophone aura par ailleurs frustré Bir Bahadur Rai, pendant les trois ou quatre premiers mois après son arrivée. Frustré de ne pas pouvoir tout de suite prendre le chemin du boulot. Il a hâte à cette nouvelle vie pour laquelle il était fin prêt. «On doit apprendre depuis le début», dit-il, un peu déçu.

Car ils veulent travailler, bien qu'ils ne sachent encore trop dans quel domaine. «On doit se tenir sur nos propres pieds», explique Geeta Rasaily, fière. «On doit comprendre [la langue]. On aura à comprendre, puisqu'on devra travailler.»

Mais ils n'ont pas de diplôme et n'ont pas développé de connaissances spécifiques liées à un domaine d'emploi particulier. Leur situation était précaire. Ils n'avaient pas d'électricité dans le camp, pour ne donner que cet exemple.



Ils ont donc dû apprendre le fonctionnement d'outils technologiques aussi simples que le four à micro-ondes ou le bouton de demande d'arrêt dans l'autobus, les deux éléments qui viennent tout de suite à l'esprit de la femme. À peu près tout, en fait.

Visiblement heureux

Malgré tout, ils sont visiblement heureux. «Nous aimons les gens du Québec. C'est en paix, c'est vraiment propre», dit Tulshi Ram Rasaily avec un sourire soulagé et sincère que partage le reste de sa famille et ses amis. Des gens fiers, et gentils.

Au Québec, ils auront aussi connu la neige et le froid. Au sommet des montagnes népalaises, il y a bien sûr des neiges éternelles, mais à leurs pieds, où étaient installés les camps de réfugiés, la température minimum dans l'année avoisinait les 10 degrés. Le choc du Québec en est donc aussi un de climat.

Généreux, ils insisteront pour remercier les gens qui les aident, et inviteront l'auteur de ces lignes et le photographe à goûter le dessert. Une fois leur français bien maîtrisé, ne reste plus qu'à espérer qu'un d'entre eux opte pour se lancer dans la restauration...