L'avenir incertain de la production des pales de 37 mètres et la fabrication graduelle d'un plus grand nombre de pales de 45 mètres par la firme LM Wind à Gaspé rendent improbable la possibilité de rentabiliser l'élargissement du tunnel, estime François Roussy, président de la Société du chemin de fer de la Gaspésie.

«S'il était certain qu'on allait transporter un grand nombre de pales de 37 mètres, ça vaudrait la peine d'élargir le tunnel. Deux pales de 37 mètres sont chargées l'une à côté de l'autre sur un wagon, comme sur un camion. Mais nous pensons que ce n'est pas la pale de l'avenir, et il serait impossible de récupérer notre investissement, étant donné la faible marge bénéficiaire à espérer et considérant la concurrence des camions», explique M. Roussy. L'usine LM Wind de Gaspé produit déjà, en plus des pales de 37 mètres, des pales de 45 mètres. Les pales de 40 et de 45 mètres ont un diamètre légèrement plus grand que celles de 37 mètres et ne peuvent donc prendre place en paire sur un wagon ou un camion.

«Les camions sont avantagés pour la pale de 37 mètres parce qu'ils n'ont pas besoin d'escorte policière», dit M. Roussy, précisant que l'escorte est requise pour les plus longues pales, ce qui désavantage le transport routier.

Les plus longs wagons plats conventionnels mesurent environ 28 mètres, ce qui suppose des dépassements aux extrémités pour les pales de 40 et de 45 mètres, et des précautions dans la façon de les placer. Le tunnel est en courbe, mais le dégagement est suffisant pour qu'elles n'accrochent pas.

Transport

François Roussy précise que la Société du chemin de fer de la Gaspésie continuera de soumissionner pour le transport de pales de 37 mètres en offrant un scénario dans lequel les pales seraient transportées par camion à New Carlisle, à l'ouest du tunnel. «Elles seraient ensuite transbordées sur des wagons pour leur livraison ailleurs sur le continent nord-américain.» D'autre part, la Société du chemin de fer de la Gaspésie jouit depuis peu d'une plus grande autonomie en matière de gestion des trains, d'entretien et de marketing de son tronçon de 202 milles entre Gaspé et Matapédia.

Deux décrets gouvernementaux étaient nécessaires pour concrétiser ce passage à une meilleure autonomie. Québec et Ottawa exigeaient jusqu'à récemment qu'un sous-traitant d'envergure, nommément le Canadien National de 2008 à 2010, supervise l'exploitation et l'entretien de la voie. Les tâches sont maintenant divisées entre la Société du chemin de fer de la Gaspésie et la compagnie montréalaise RailTerm.

La firme gaspésienne vient aussi d'obtenir le feu vert pour créer un fonds de développement avec une partie des revenus nets réalisés en transportant des marchandises. «Nous pourrons garder 25 % des revenus nets pour ce fonds», précise M. Roussy, qui est aussi maire de Gaspé.

La Société du chemin de fer de la Gaspésie possède l'axe Gaspé-Chandler depuis 1997. À l'été 2007, Québec et Ottawa ont versé 35 millions $ pour permettre à cette entité créée par les municipalités d'acheter l'axe Chandler-Matapédia et de l'exploiter pendant cinq ans. Le montant d'achat s'est établi à 16 millions $, le solde de 19 millions $ allant à l'entretien et à l'exploitation.

Jusqu'à la création du fonds de développement, tous les revenus nets de la Société du chemin de fer de la Gaspésie devaient être retournés à l'État pour diminuer la subvention de 19 millions $. Actuellement, le transporteur y fait circuler environ 2000 wagons de fret par an. Il en faudrait 5000 pour être financièrement rentable. Le passage du train de VIA Rail constitue une autre source importante de fonds.