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«Souvent, avec les filles, il suffit de deux ou trois essais pour que toutes les assiettes soient pareilles», a remarqué Marie-Chantal Lepage, dont le statut de vedette féminine attire un lot de recrues dans les cuisines du Château Bonne-Entente.
Daniel Vézina, lui, apprécie le penchant des femmes pour la communication, autant quand ça va bien que quand ça va mal. «Les gars ont tendance à encaisser, à ne rien dire et à un moment donné, ils s'en vont», a-t-il remarqué. Cela dit, il ne se fait pas d'illusions sur la fidélité des chefs de l'autre sexe quand sonne l'horloge biologique. «Quand une fille rentre dans ta cuisine, tu sais déjà qu'elle va partir», dit-il, un peu comme le chanterait un crooner.
Florence Albernhe, chef-propriétaire au Grain de riz, ne saurait trop insister sur l'importance de se faire respecter. Une fois, une seule, un de ses employés l'a appelée «ma belle». Il a vite compris qu'elle n'était pas sa belle, mais le patron. «Les jokes trop grasses, dans ma cuisine, c'est non», répète-t-elle pour bien se faire comprendre.
En même temps, Mme Albernhe confesse des qualités très maternelles. Elle essaie de faciliter la vie de ses employés en leur offrant des horaires réguliers et en accommodant ceux qui doivent prendre soin de leurs enfants. Elle aime leur concocter des petits plats en dehors du menu régulier et les emmener en voyage de formation avec elle. «Je n'ai pas d'enfants, alors c'est un peu comme ma famille», lance-t-elle. Une main de fer dans un gant de velours.
L'image sied aussi bien à Herminia de la Cruz, chef du Poisson d'avril. «J'ai la rigueur de dire exactement ce que je veux, là, tout de suite. Mais en même temps, j'ai le sang latin, alors j'aime ça rire, danser, même me coller!» raconte la dame originaire de République dominicaine, rompant avec l'image du chef aussi tyrannique que bedonnant qui survit dans l'imaginaire collectif.
Yvon Godbout, chef à la Fenouillère et professeur au Collège Mérici, admet que les femmes doivent «passer le test» dans une cuisine en démontrant un grand sens de l'humour et une bonne capacité à gérer le stress.
Les taquineries des hommes ont en effet survécu à l'émancipation des femmes, et la loterie des commandes - tout le monde veut la même chose en même temps - ne cessera jamais.
S'il a déjà dirigé une brigade à 90% féminine, M. Godbout avoue bien candidement qu'il y a une limite au nombre de femmes qu'une cuisine peut accueillir, au risque de voir les conflits se multiplier. Le ratio hommes-femmes idéal tournerait plutôt autour de 50-50. «Il fut un temps où j'avais vraiment trop de filles dans ma cuisine. J'ai arrêté ça: c'était rendu dangereux!» dit M. Godbout en riant. Il n'est pas le seul à l'exprimer. Absolument tous les chefs à qui nous avons parlé ont confirmé l'importance de la mixité en cuisine pour une meilleure harmonie.