Réseau Liberté-Québec: la droite citoyenne sort de l'anonymat

Deux des cofondateurs du Réseau Liberté-Québec, Joanne Marcotte et Éric Duhaime, étaient visiblement ravis du déroulement du premier rassemblement du mouvement de droite.

Fini les blogues anonymes, les campagnes web virales et les invités mystères. Après des mois de gestation, la droite citoyenne du Réseau Liberté-Québec est sortie au grand jour hier à l'Hôtel Gouverneur de Sainte-Foy. De quoi raviver la flamme des tenants du conservatisme économique... et décevoir ceux qui attendaient la création d'un nouveau parti - option rejetée du revers de la main. Tout comme un rapprochement officiel avec l'initiative de l'ancien ministre péquiste François Legault.


Le Réseau Liberté-Québec (RLQ) aura tenu parole. Les adeptes de ce mouvement de base de type grassroot ont afflué sur le boulevard Laurier. La salle - pleine à craquer - n'a pas réussi à contenir la foule majoritairement masculine venue d'un peu partout dans la province pour entendre quelques invités de marque de la droite québécoise et canadienne.

Et le premier venu galvaniser les militants aura fait tourner les têtes : Jean-François Fillion, l'animateur de radio aux propos controversés par le passé, a eu l'honneur de baptiser publiquement le RLQ. «C'est une continuité de ce que je prône depuis plusieurs années, a-t-il soutenu. Les gens doivent apprendre c'est quoi la droite, il faut arrêter de faire peur avec la droite. S'il faut, on enlèvera le mot droite et on parlera de gros gouvernement contre petit gouvernement. Il faut arrêter de démoniser.»



L'ancien morning man vedette de la station CHOI Radio X a été impliqué au sein du mouvement depuis juillet dernier. Il a été convaincu par Joanne Marcotte, réalisatrice du documentaire L'Illusion tranquille et une des cofondatrices de l'initiative. Celle-ci a présenté Jeff Fillion comme «quelqu'un qu'on aime tous, qu'on adore tous». M. Fillion a fait un parallèle avec son discours de l'époque où il dominait les ondes dans les capitales. «Nous avions un slogan à CHOI à l'époque qui disait : "Nous sommes des X". Maintenant, on peut dire : "nous sommes de droite''».

Mme Marcotte a quant à elle prévenu ses adversaires de gauche, disant «qu'ils ont raison de nous craindre», tout en écartant à son tour toute constitution d'une formation politique. «Le RLQ est un mouvement qui n'est pas destiné à devenir un parti politique», a-t-elle assuré.

Les politiciens n'ont pourtant pas boudé cette agora d'un jour. Le chef de l'ADQ, Gérard Deltell, ne s'est pas senti menacé une seconde par la naissance de ce véhicule pour idées libérales. «C'est une des plus belles journées de la démocratie au Québec», a-t-il lancé, radieux et bien en verve, ravi de constater qu'il n'était pas le seul présent dans la salle à conclure «qu'il est temps plus que jamais de rapprocher le nationalisme du centre-droit».

Le chef du troisième parti à l'Assemblée nationale est rejoint dans son enthousiasme par le député conservateur de Beauce, Maxime Bernier. Celui-ci a qualifié la rencontre de «nouveau chapitre dans l'histoire du Québec qui est en train de s'écrire». Sans jamais mentionner une seule fois le nom de sa formation politique, le Parti conservateur du Canada, Maxime Bernier a salué les libertaires réunis à Québec. «Des gens qui prônent la liberté individuelle, des gens qui veulent que l'État arrête de les prendre pour des enfants irresponsables. Qu'on arrête d'avoir des États tentaculaires qui s'ingèrent dans la vie de tous les jours. Je pense que c'est un peu la ligne ici, c'est la liberté individuelle, et les Québécois, c'est ce qu'ils souhaitent!»



Un souhait qui n'est pas partagé par tous. Aux aurores, des inconnus avaient salué la tenue de l'activité en déposant un tas de fumier à la porte de l'établissement... Éric Duhaime, un des cofondateurs du RLQ et ancien conseiller politique de Mario Dumont, a récupéré ce désagrément matinal en soulignant que «le seul dérapage qui a eu lieu, c'est la gauche qui est venue nous le déverser devant la porte ce matin [hier].»

Sans lien avec cet incident, une quinzaine de manifestants de l'Alternative socialiste ont dénoncé la conférence. Ils ont manifesté à l'heure du lunch dans le stationnement voisin du restaurant Bâton Rouge, disant vouloir respecter le caractère privé de l'hôtel. «On veut faire tomber les masques d'une droite qui se dit pragmatique, mais dans les faits, c'est un retour du Duplessisme. C'est une journée de conférence qui rassemble des libertariens notoires, des conservateurs moraux, des populistes de tout acabit. C'est une droite qui est encore plus à droite que celle de l'ADQ, du PLQ ou du PQ», a scandé leur porte-parole, Julien Daignault.