Médias et racisme : encore du travail à faire

C'est la faute aux médias. Air connu mais semble-t-il toujours d'actualité, si on se fie aux résultats d'une chercheuse qui a analysé le travail de certains médias canadiens après le 11 septembre et la crise du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS).


La Fondation canadienne des relations raciales (FCRR), qui vise l'élimination du racisme et la collaboration harmonieuse entre les communautés culturelles, a demandé à la professeure Jian Guan, du département de sociologie de l'Université Ryerson, à Toronto, d'enquêter. La chercheuse s'est penchée, dans le cadre d'une vaste étude sur l'intégration des immigrants post-11 septembre et post-SRAS, sur la couverture, par certains médias anglophones, d'événements qui ont ciblé des communautés culturelles bien identifiées. On parle ici des Arabes et des musulmans, à la suite du 11 septembre, et des Chinois et autres communautés asiatiques, après la crise du SRAS.

À l'occasion du congrès annuel de l'Association d'études canadiennes, qui se tenait hier à Québec, la professeure Jian Guan était sur place, avec la FCRR, pour présenter une partie des résultats de ses recherches. La chercheuse s'est basée sur l'analyse de reportages dans des médias anglophones écrits, soit les revues Maclean's et Times (édition canadienne) et les quotidiens The Globe and Mail, National Post et Toronto Star.



Dans l'ensemble, elle juge sévèrement les médias. Par exemple, à la suite du 11 septembre, la peur du terrorisme a rationalisé et normalisé un certain racisme envers les Arabes et les musulmans. C'était devenu normal d'être soupçonneux envers eux. Par exemple, «les médias mentionnaient constamment “la prochaine fois'', entretenant cette peur et cette méfiance», a-t-elle expliqué.

De même, dans la crise du SRAS, le sensationnalisme médiatique de l'événement a dirigé la peur directement sur les Asiatiques, les médias donnant visuellement à la maladie le visage de membres des communautés asiatiques. Selon Mme Guan, les deux événements ont été «racialisés». Elle y voit du profilage racial.

Le directeur général de la FCRR, Ayman Al-Yassini, con­vient que le traitement des médias associé aux communautés culturelles s'est beaucoup amélioré mais... «Lors de crises majeures, comme le 11 septembre par exemple, on (les gens issus des communautés culturelles) redevient des étrangers, même ceux qui sont nés ici», constate M. Al-Yassini. Il pense qu'on peut équilibrer le droit d'expression et la sensibilité légitime des communautés, qui se voient bien souvent montrées du doigt dans leur ensemble à l'occasion d'un événement malheureux impliquant quelques individus bien précis.